Archives mensuelles : octobre 2011

Les aventures de Moïse / 8. Moïse pète sa crise (première partie)

 

«Tant qu’on n’aura pas diffusé très largement à travers les hommes de cette planète la façon dont fonctionne leur cerveau, la façon dont ils l’utilisent et tant que l’on n’aura pas dit que jusqu’ici cela a toujours été pour dominer l’autre, il y a peu de chance qu’il y ait quoi que ce soit qui change.»
Henri Laborit, Mon oncle d’Amérique

Si vous n’y voyez pas d’inconvénient, on va commencer par une nouvelle fiction à visée pédagogique.

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Il marchait d’un bon pas. Assez lent pour que ses yeux puissent profiter du magnifique paysage sans cesse renouvelé, assez rapide pour qu’il n’ait pas le temps de s’en lasser.
Un jour, au détour d’une chênaie, il rencontra un âne. Un âne qui parlait.
– Ô fier bipède, tu m’as fait peur ! C’est que je ne m’attendais pas à te voir passer par ici. À moins que tu aies délibérément choisi de rallonger ta course ! Il est vrai que le paysage est magnifique de ce côté de la forêt…
– Pardon, noble baudet», rétorqua le marcheur, «… qu’entends-tu par «rallonger ma course» ? Saurais-tu donc où je me rends ? Parce que moi, je n’en ai pas la moindre idée…
– Talbin – c’est mon nom – sait tout ! Il sait également que tu parviendrais à destination bien plus vite si tu montais sur son dos ! Voici ce que je propose : je te conduis sain et sauf là où tu dois aller et, en échange, tu me ramasses ma ration de chardons quotidienne ? J’ai du mal à me pencher avec ma sciatique…
– C’est tout ?
– C’est tout.

Au début l’ex-marcheur n’avait vu que des avantages à sa nouvelle situation. Il se trouvait fière allure, perché sur sa monture, se trouvait beau garçon, juché sur son ânon. Il n’avait de cesse de se la péter auprès des Autres. Il appelait ainsi la bande de bipèdes hirsutes qui avançaient dans le même sens que lui, sans savoir vers quoi exactement, comme lui avant sa rencontre avec Talbin.  A propos il n’était pas loin de midi et il fallait qu’il se dépêche de cueillir le …ouille ! ça piquait, cette saloperie !… repas de son sauveur. Les années avaient passé et la sciatique de ce dernier ne montrait aucun signe de guérison.

Bien au contraire. Ainsi, un soir au bivouac :

– Euh, dis-donc fier bipède…En attendant que ça s’arrange pour mon dos, je me demandais si tu ne pourrais pas, temporairement, redevenir piéton… Temporairement, j’insiste… Ça me permettrait de guérir plus vite… On y gagnerait tous les deux, non ?
– Je vois, fidèle Talbin. Je devine ce qu’il t’en coûte de me faire ainsi part de ton impuissance – toute provisoire, j’en suis persuadé moi aussi – à assumer ta part du deal. Eh bien, ne serait-ce que, eu égard au sens que ta présence a donné à mon existence futile, je ne serai point celui qui, par un égoïsme coupable, osera continuer à ajouter le fardeau de sa pesante personne à …
– Cool ! Et …euh, je veux dire.. pour mes chardons, on change rien, d’accord ?

De ce jour, donc, on vit l’âne et l’ex ex-marcheur cheminer de concert. Les Autres, constatant que leur leader (après toute son intox de vendeur de savonnettes on avait fini par accepter de l’appeler “patron”), une fois redescendu de son âne ne pouvait plus leur chier dessus, à moins de sauter sans arrêt comme un marsupial, commençaient à se livrer à des associations d’idées impliquant des rapports de causalité post cavernicoles desquels il pourrait ressortir, en quelque sorte et sans préjuger de l’avenir que «c’est celui qui monte l’âne qui est le boss mais que si le boss marche derrière l’âne, même à quatre pattes pour ramasser les chardons de sa bouffe, nettoyer ses merdes et prendre un coup de queue en se relevant, c’est quand même le boss, sinon ça dégoûterait tout le monde de vouloir être le boss et la civilisation courrait à sa perte et belle soirée à v….»

– Hé ! Fier bipède ! Tu peux baisser un peu la radio ? Je ne m’entends plus ruminer.
– Mon pauvre Talbin ! Excuse-moi ! C’est qu’avec les cris que je pousse en me piquant à ces salop …délicieux chardons dont tu aimes à te sustenter si chichement, je n’arrive pas bien à entendre les tendances à la Bourse de Paris.

Si Talbin ne s’entendait pas ruminer, il ne se voyait pas grossir non plus. En déficit d’exercice physique depuis qu’il n’avait plus personne à trimbaler,  il aurait dû se peser plus souvent. Précaution salutaire qui lui eût épargné le constat brutal auquel il fallut bien qu’il se résolve un matin : son obésité avait fini par franchir les limites du supportable pour ses jarrets sous-entraînés.
Ce que voyant, le boss réunit en toute hâte les docteurs en ânerie les plus pointus des temps pré-modernes. Après une auscultation approfondie du malheureux équidé, les savants déclarèrent qu’en attendant que ce dernier trouve en lui la force héroïque de commencer à envisager l’éventualité d’une réduction hyper progressive de sa consommation de chardons, il était urgemment indispensable de se mettre à la construction d’une charrette à bord de laquelle le malade puisse être hissé afin de continuer à conduire la civilisation vers un salut dont lui seul connaissait les coordonnées.

Extrait du discours du boss en vue de la construction d’une charrette pour transporter son âne :

«Bipèdes, bipèdes !

Contrairement à cèlzéceux qui n’ont pas compris que, faute d’être remboursés au triple de ce qu’ils ont eu l’altruisme quasi suicidaire de prêter, les riches risquaient de s’appauvrir alors que les pauvres resteraient pareils, ce qui, démocratiquement parlant, constitue une anticonstitutionalité somme toute préjudiciable en termes de croissance au beurre puisque relevant d’un concept à investiguer au plus vite mais sans précipitation malsaine pourquoi parce que et je vais vous le dire j’ai pris l’indécision inaliénable et sacrée de “make ze galaxy great again”  en commençant par la débarrasser de tous les infidèles qui vont jusqu’à douter de la laïcité de Dieu… »

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Tout le monde n’a pas le génie des évangélistes des commissions et, au cas où, conséquence d’une pensée brouillonne alliée à une expression désespérément lourdaude, ma parabole de l’ «âne enfumeur» s’en allait ne point atteindre le but que je me suis fixé dans ces “Aventures de Moïse”, le voici une fois encore exposé en caractères gras, ce but : mettre au jour la relation étroite entre le principe abrahamique de la domination des uns sur les autres (en général et par le biais de l’argent en particulier) tel que revendiqué par Moïse dans ses pense-bêtes à l’intention de peuples élus de force et le mal de vivre d’une espèce prise en otage par ses craintes existentielles.

Talbin, comme son nom en témoigne, représente l’accumulation de richesses par définition fictives, résultat navrant de pratiques commerciales pseudo-sacrées, d’héritages claniques crainteux bénis par des escrocs passés maîtres dans la pratique du chantage au paradis-perdu-retrouvable-sous-condition, cette condition étant justement la croyance, à genoux, à plat ventre, ou cul par-dessus tête, en la nécessité de rouler son voisin dans la farine avant qu’il vous transforme en escalope milanaise le premier.
Les instances mosaïques (rabbins, papes, imams), à l’instar de tous les chefs d’entreprises de mise-en-danger-de-celui-qui-ne-sait-pas-par-celui-qui-prétend-savoir-sans-avoir-à-le-prouver, c’est-à-dire tous les consortiums pourvoyeurs de superstitions rétrogrades reposant sur rien d’autre que notre peur de mourir, savoir, en gros, toutes les superstitionsj’ai, étymologiquement, un mal fou à parler de « religions » – n’ont aucune envie d’orienter en douceur nos «systèmes associatifs»(1) vers l’abandon de leur fonds de commerce juteux. Savoir, un comportement animal qui, une fois l’homo sapiens-sapiens enfin extirpé de sa caverne glaciale cernée par les prédateurs, n’a plus lieu d’être.
Au contraire ! Pour nous faire ingurgiter jusqu’à la lie notre soupe archétypale mortifère quotidienne, les sommités juchrémanes s’appuient sur toutes les paranos possibles et imaginables enfouies dans les circonvolutions mollassonnes de notre bon vieux cerveau reptilien :
«Chez l’homme, ce cerveau serait principalement responsable de certains comportements primaires comme la haine, la peur, l’hostilité à l’égard de celui qui n’appartient pas au même groupe que soi, l’instinct de survie, la territorialité, le respect de la hiérarchie sociale, le besoin de vivre en groupe, la confiance dans un leader, etc.» (2)
…Et hop ! En moins de siècles qu’il en faut pour le dire, cela donne le spectacle consternant et ô combien actuel d’une pré-humanité lobotomisée à souhait, au point de se laisser persuader qu’elle est perdue dans le désert de sa peur ontologique sans un argent/âne confit dans son gras, désormais incapable d’avancer par ses propres moyens vers un futur dont il a depuis toujours choisi d’ignorer l’existence.

 

(1) Henri Laborit est un grand de chez grand, lisez-le, chantez-le, apprenez-le par cœur !
« Beaucoup d’entre nous mourront ainsi sans jamais être nés à leur humanité, ayant confiné leurs systèmes associatifs à l’innovation marchande, en couvrant de mots la nudité simpliste de leur inconscient dominateur »
Henri Laborit,  Mon Oncle d’Amérique

(2) source Wikipédia
(à suivre : Moïse pète sa crise (deuxième partie) )

Les aventures de Moïse / 7. Moïse lave plus blanc (suite et fin)

 

Genèse 16.15 : «Agar enfanta un fils à Abram ; et Abram donna le nom d’Ismaël au fils qu’Agar lui enfanta

Non ce n’est pas une coquille. Du temps où, inspiré par Yahweh et avec l’accord de son épouse “Saraï ” – ce n’est pas une coquille non plus – qui semblait ne pas pouvoir enfanter, Abraham, avait eu recours à une mère porteuse, Agar, servante de Saraï, pour engendrer son premier fils, il s’appelait encore «Abram». Ismaël avait déjà 13 ans lorsque, ayant pris soin de circoncire père et fils, l’ Éternel changea l’état civil d’ “Abram” en  “Abraham”  et celui de  “Saraï”  en  “Sara“. Mais surtout, dans la foulée et malgré l’âge fort avancé de la dame, il autorisa enfin celle-ci à donner à son mari un deuxième fils: Isaac.

Décidément, même en orthographe, les voies du Seigneur etc… Nous retiendrons cependant que :

1/ Ismaël est l’aîné des fistons d’Abraham MAIS pondu hors mariage.  Un bâtard conçu avec une servante non juive, égyptienne, pour être précis.

2/ Isaac est le fruit légitime de l’union entre Sara et Abraham MAIS le cadet d’Abraham, sinon celui de ses soucis.

Parce que c’est là où le bât blesse entre Juifs (lignée Isaac) et Musulmans (lignée Ismaël) (1). Sauf qu’à ce stade des opérations l’Islam n’existe pas encore. Ce n’est que 1280 ans plus tard que Muhammad, expert-comptable de son état (2) va revendiquer la suprématie de sa filiale toute fraîche au sein de la SARL Abraham & Fils. Au point de faire d’Ismaël, contrairement à ce que racontent ces fieffés menteurs de Juifs,  le fils que Dieu demande à Abraham de lui sacrifier :

Coran, Sourate 37:102 Les rangés (As-Saffat) :

«Puis quand celui-ci fut en âge de l’accompagner, [Abraham] dit : « Ô mon fils, je me vois en songe en train de t’immoler. Vois donc ce que tu en penses ». (Ismaël) dit : « Ô mon cher père, fais ce qui t’es commandé : tu me trouveras, s’il plaît à Dieu, du nombre des endurants ».»

Quelques mots sur les populations arabes, souvent nomades (3) que Muhammad va s’attacher à convaincre de leur appartenance à la tradition biblique:

« Les Arabes font leur première apparition dans l’histoire en 854 avant Jésus-Christ : l’arabe Gindibu soutint Bin Idri de Damas (le Ben Hadad II de la Bible) en lui amenant mille chameliers du pays d’Aribi à l’occasion de la bataille de Qargar[…] Peut-être le camp de Gindibu était-il situé au sud-est de Damas. Il est certain que les éléments bédouins de la péninsule arabique – qu’on appelait probablement indifféremment Aram, Eber ou Haribu – devaient être installés à l’origine, dans la région qui s’étend entre la Syrie et la Mésopotamie et qui fut, avec la Syrie le berceau le plus ancien des Sémites.» (4)

Sur leur positionnement en matière religieuse, Maxime de Tyr (philosophe grec du 2ème siècle) rapporte, dans ses Dissertations, que «les Arabes adorent aussi, mais je ne sais quoi. Quant à l’objet sensible de leurs adorations, je l’ai vu, c’est une pierre quadrangulaire.»

C’est  donc aux descendants de ces braves gens qui ne demandent  rien à personne que, comme Jésus et les premiers Chrétiens 600 ans auparavant à d’autres braves gens qui ne leur demandaient rien non plus, Muhammad proclame son intention de  redonner à la SARL Abraham & Fils toute la crédibilité que ses précédents administrateurs, par leurs excès, dépravations et autres errances lui ont fait perdre :

Coran, [5:66] La table servie (Al-Maidah) :

«S’ils avaient appliqué la Thora et l’ Évangile et ce qui est descendu sur eux de la part de leur Seigneur, ils auraient certainement joui de ce qui est au-dessus d’eux et de ce qui est sous leurs pieds. Il y a parmi eux un groupe qui agit avec droiture; mais pour beaucoup d’entre eux, comme est mauvais ce qu’ils font !»

Pourtant, dans les faits, la troisième et dernière mouture à ce jour de l’entreprise abrahamique de récupération de la Grande Peur du Néant Ontologique, ne se distingue des deux premières que par une seule trouvaille : l’interdiction du «riba» ou «usure» ou encore (au bénéfice du doute sémantique) : “prêt à intérêt” .

Coran, Sourate II, versets 278 et 279.

«Ô croyants! Craignez Dieu; et renoncez au reliquat de l’intérêt usuraire, si vous êtes croyants.
Et si vous ne le faites pas, alors recevez l’annonce d’une guerre de la part de Dieu et de Son messager.
Et si vous vous repentez, vous aurez vos capitaux. Vous ne léserez personne, et vous ne serez point lésés.
Pour l’observateur impartial, force est d’admettre que cette tentative d’assainir le monde de la finance, tentative louable (autant qu’étrangement schizophrénique dans la mesure où, nous l’avons vu, le monde de la finance repose sur le principe divin de l’arnaque de son prochain, «étranger» tant qu’à faire) n’a eu que de très modestes retombées sur le comportement des Musulmans dans le domaine de l’enrichissement personnel. A cela on peut avancer au moins deux explications.

La formulation même du verset – «et si vous vous repentez vous aurez vos capitaux» – nous indique que le Coran s’inscrit dans une culture de type capitaliste qui n’a rien à remontrer à celle des Juifs ou des Chrétiens. Ainsi la sourate 4, (An-Nisa) est presque entièrement consacrée au respect dû à la notion d’héritage et recommande à ce propos de ne pas mettre en cause les inégalités qui en découlent :

32. «Ne convoitez pas ce que Dieu a attribué aux uns d’entre vous plus qu’aux autres»

Certes, le Coran, imitant en cela l’Ancien et le Nouveau Testament, ne manque pas de vilipender l’impiété détestable des riches, à qui il est répété que ce ne sont pas leurs possessions terrestres qui leur feront gagner le royaume des cieux. Toutefois et qu’on se le dise, il n’est pas question pour les Musulmans de douter du bien-fondé du clivage dominant/dominé, à la condition expresse que le dominant reconnaisse à son tour son statut de subalterne du Tout Puissant.

Une autre raison, d’ordre technique cette fois, de la quasi absence d’effet de l’interdit du prêt à intérêt sur la société musulmane est à rechercher dans la propension remarquable des ulémas (ou «docteurs de la Loi») à inventer mille et un stratagèmes (hiyals), absolument légaux bien sûr, pour lire dans le Coran des choses qui n’y sont point écrites.

Dans la série « l’hôpital se moque de la charité » le «penseur» (et parieur invétéré) chrétien Blaise Pascal, s’amuse  à donner un exemple de ces «contournements» de la Loi coranique:

«Je vends ce livre 120 payables dans un an, je le rachète immédiatement pour 100 payables tout de suite. Donc je garde mon livre, donne 100 et reçoit 120 dans un an.»(5)

Blaise veut-il parler du « Mourabaha » , ou « financement commercial avec marge bénéficiaire»?

«La banque acquiert une marchandise pour le compte de son client, moyennant une marge bénéficiaire fixée à la signature du contrat. La banque transfère la propriété de la marchandise à son client une fois qu’il a payé le prix de celle-ci ainsi que la marge fixée à la signature. Ce type de contrat diffère du prêt à intérêt car la marge est fixe et n’augmente pas avec le délai de paiement.»(6)

J’ai comme la vague impression qu’on joue là sur les mots et en terminerai avec le cahier des charges de notre nouvelle filiale abrahamique en citant quelques hadiths de la sunna, autre spécificité musulmane prétendant rapporter les dires du Prophète (qui avait, lui même, commencé dans la vie en tant que négociant en bétail):

«Le marchand sincère et de confiance sera (au jour du Jugement) parmi les prophètes, les justes et les martyrs»,

«Le marchand de confiance sera assis à l’ombre du trône de Dieu au jour du Jugement»

…ou encore :

«Les marchands sont les courriers de ce monde et les curateurs fidèles de Dieu sur la terre»(7)

Après les banquiers de Jésus, les marchands de Muhammad. En vérité, je vous le dis, hors la finance, point de salut pour un Juchréman sincère.

 

(1) Les douze fils d’Ismaël dont il est fait mention dans la Bible ont été repris par la tradition musulmane. Il est dit que deux d’entre eux s’établirent à La Mecque, où ils fixèrent leur demeure, savoir : Nebajoth et Kédar. Kédar est l’ancêtre des Quraychites, la tribu de Muhammad.

(2) au service de Khadija, une riche veuve à la tête d’un commerce caravanier, qu’il finit par épouser . (ibn Habîb al-Baghdâdî (m.245), Muhabbar p. 79. Haydarabad. / al-Balâdhurî (m.279),Ansâb’al achrâf tome I paragraphe 177 Caire 1959.)…avant quatorze autres, dont l’une avait six ans quand il l’épousa. (Tabari, op. cit., vol. II, « Mohamed, sceau des prophètes », p. 327)

(3) Hommes voilés et femmes libres : les Touareg, par Marcel Baudin, publié par L’Harmattan.

(4) Marc Bergé, Les Arabes, p. 20.

(5) Blaise Pascal, Les Provinciales (la huitième) (1657)

(6) cf Ismail, Muhammed Imran (2010)
Ph.D. thesis, University of Birmingham.)

(7) Rodinson, Maxime, Islam et capitalisme, 1966, Paris, Seuil p33

 

(à suivre: Moïse pète sa crise)

les aventures de Moïse / 6. Moïse lave plus blanc (troisième partie)

 

A l’heure démocratique où les petits chefs de gôche et de drouate se fouillent et se trifouillent pour se trouver un surchef qui, dès que le top sera donné, tâchera de se faire nommer surchef en chef d’une bande de préhistoriques post cavernicoles, grands massacreurs de migrants et de lapins et bafouilleurs de marseillaise footballistique devant l’ «Éternel des armées», je continue mon petit bonhomme de chemin à travers la forêt des archétypes abrahamiques en lien direct avec la panade psycho socio économique dans laquelle l’homo sapiens-sapiens se débat actuellement.

De temps à autre monte, aux quatre coins de notre ronde planète une «indignation» dans laquelle nous nous jetons à corps perdus pendant au moins trois semaines. Et puis on retourne dormir. Les Chrétiens de l’an 000 eux aussi s’indignaient comme des fous. Et on vient de voir que cela ne les empêchait pas de se faire plus ou moins consciemment les continuateurs de pratiques discutables. Les banquiers chrétiens s’appliquaient scrupuleusement à respecter un cahier des charges directement hérité du système juif. Ils persistaient à faire de l’argent avec l’argent, à «donner à celui qui a» et à «ôter à celui qui n’a pas, même ce qu’il a », selon la volonté du Père. Sous peine de se voir jeter par le Fils «dans les ténèbres du dehors, où il y aurait des pleurs et des grincements de dents».

Les conseils d’administration d’ascendance «étrangère» qui s’en vinrent, au fil des générations, remplacer les Chrétiens juifs de souche aux commandes de la nouvelle filiale respectèrent leur prudence. Ils évitèrent sagement de suivre les Évangiles à la lettre concernant le mépris des biens de ce monde et l’égalité entre les hommes, préférant mettre en place une hiérarchie paramilitaire, vénale au possible, qui n’était pas sans rappeler les pires cauchemars des Esséniens.

Ainsi, vers la fin du 1er siècle, du fond de son Asie Mineure, un certain Ignace d’Antioche exigea des communautés chrétiennes leur soumission à l’«épiscope» «qui tient la place de Dieu lui-même». Exit le modèle collégial ou «église», du grec eklesia, «l’assemblée du peuple» dont avaient, un court instant, rêvé les premiers fans de Jésus. On gardait le mot, ça sonnait mieux que «conseil d’administration», on lui collait même une majuscule mais finie cette histoire d’«assemblée» ! Un président à vie, le “pape“, ferait mieux le boulot, aidé en cela par une bonne équipe de ministres lèche-pantoufles, les “cardinaux” qui, à leur tour nommeraient leurs propres cire-pompes, les “évêques” et cætera i tutti quanti, jusqu’aux “curés” et autres bedeaux descentes-de-lits et roule ma poule, les vaches chrétiennes seraient bien gardées.

Donc plus d’assemblée mais on conservait le concept de «peuple». Un nouveau «peuple élu» (1), appelé à croître et à multiplier dans des proportions mille fois plus conséquentes que le précédent puisque non soumis (2) aux critères génétiques juifs. En effet, le Nouveau Testament, contrairement à l’Ancien n’interdisait pas au Chrétien de «contracter un mariage» ni de «donner ses filles» ni de «prendre les filles» de qui que ce fût «pour ses fils». Du moins en théorie. En pratique, les “qui-que-ce-fût” étaient plus qu’encouragés à se mettre à la nouvelle lessive – pardon : à se faire “baptiser” – dans les plus brefs délais.

Et pas que pour se marier, camarades Juchrémans ! Le Moyen Orient des inoubliables «croisades», l’Amérique centrale et méridionale des «conquistadors» puis l’Amérique du Nord de Buffalo Bill, grand affameur de « Peaux-Rouges » en Jésus-Christ, sans parler, bien sûr, de l’Afrique des missionnaires et de leur position discutable à plus d’un titre, allaient, au cours des millénaires à venir, comprendre leur douleur si, par mégarde, ils oubliaient de se faire laver du péché originel par qui de droit.

«Un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu»

Pourtant, au siège du Parti Monothéiste Libéral des années + 600, on n’était  pas tout à fait certain d’avoir fait le plein des suffrages «étrangers» dès le premier tour… En manière d’illustration, je vous propose un bref retour à la fiction pédagogique entamée deux chapitres en arrière.

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Etats-Unis d’Amérique / siège de la multinationale Procter & Gamble, année + 1967

– Gamble, tu dors ?

– Non, et toi Procter ?

-Non, puisque je te cause…

– Je suis bête. Donc ?

– Donc j’ai repensé aux résultats de notre dernière étude de marché et je me dis que la demande mondiale en machines à laver a encore fait un bond pas possible alors que nos ventes de lessive, Bonux et Dash réunis stagnent un tantinet…

– Je te vois venir, mon Procter ! Tu te dis qu’il serait peut être temps de sortir un nouveau label avant qu’Unilever nous broute l’herbe sous le pied !

– Tout juste ! J’ai même une idée sur l’angle d’attaque qu’il conviendrait d’adopter. Tu vas rire mais ces grands couillons de hippies et leur obsession de retour à la nature en sont à l’origine ! Notre prochain bébé – Ariel c’est un joli nom, tu trouves pas ? – se distinguerait des autres par sa formule entièrement BIOLOGIQUE !

– Qu’est-ce que t’entends par là, Procter ?

– Que dalle, c’est même un mot fait exprès pour ça. Mais je te rassure tout de suite : ça ne nous coûterait pas un rond. Comme d’hab’ on change une ou deux molécules mais on garde le même circuit de fabrication/ promotion/ distribution…

– Procter, je t’aime ! Et je sens que je vais aimer Ariel, la première lessive biologique du monde libre !

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1.11. «C’est aussi en lui que nous avons été élus, ayant été prédestinés suivant la résolution de celui qui opère toutes choses d’après le conseil de sa volonté»

(2) année + 49 : Le concile de Jérusalem déclare les non-Juifs libres à l’égard de la loi mosaïque.

lire le chapitre suivant:  Moïse lave plus blanc (suite et fin)

Les aventures de Moïse / 5. Moïse lave plus blanc (deuxième partie)

 

N’en déplaise, d’une part, aux “antisémites” (1) de tous bords et, d’autre part, aux Sionistes particulièrement virulents en ce début de 21ème siècle, les Juifs n’ont, historiquement, jamais formé un seul et unique peuple chargé, comme se justifient les premiers, de conduire le reste de l’humanité (ou “goys”) à sa perte ou, comme se lamentent les seconds, d’échapper coûte que coûte au mauvais sort que lesdits “goys”, jaloux de son statut de chouchou de Yahvé, cherchent à lui faire subir.

Aux alentours de l’an 0, hors les douze tribus d’Israël recensées par la Bible, les sectes rivales se conformant de près ou de loin aux préceptes de la Torah se comptaient par dizaines. C’est d’ailleurs ce «de près ou de loin» qui agaçait prodigieusement Yahweh. Au point qu’il finit par nous piquer une de ces grosses colères dont il avait le secret et décida de punir tout le monde, ainsi qu’en témoignent les derniers chapitres du Deutéronome, (vraisemblablement écrits a posteriori).

Deutéronome chap31 :

16. «L’Éternel dit à Moïse: Voici, tu vas être couché avec tes pères. Et ce peuple se lèvera, et se prostituera après les dieux étrangers du pays au milieu duquel il entre. Il m’abandonnera, et il violera mon alliance, que j’ai traitée avec lui.

17. En ce jour-là, ma colère s’enflammera contre lui. Je les abandonnerai, et je leur cacherai ma face. Il sera dévoré, il sera la proie d’une multitude de maux et d’afflictions, et alors il dira: N’est-ce point parce que mon Dieu n’est pas au milieu de moi que ces maux m’ont atteint?»

Le chapitre 28 du même Deutéronome annonçait déjà la couleur :

«Bénédictions et malédictions» :

45. «Toutes ces malédictions viendront sur toi, elles te poursuivront et seront ton partage jusqu’à ce que tu sois détruit, parce que tu n’auras pas obéi à la voix de l’Éternel, ton Dieu, parce que tu n’auras pas observé ses commandements et ses lois qu’il te prescrit.»

Parmi «ces malédictions» fort déplaisantes au demeurant et dont je vous communique ci-après quelques extraits, il en est une qui fait écho à un thème fondateur de l’Âge de l’Argent cher à Moïse. Devinez laquelle !

22 «L’Éternel te frappera de consomption, de fièvre, d’inflammation, de chaleur brûlante, de dessèchement, de jaunisse et de gangrène, qui te poursuivront jusqu’à ce que tu périsses.»

27 «L’Éternel te frappera de l’ulcère d’Égypte, d’hémorroïdes, de gale et de teigne, dont tu ne pourras guérir.

28 L’Éternel te frappera de délire, d’aveuglement, d’égarement d’esprit,»

35 «L’Éternel te frappera aux genoux et aux cuisses d’un ulcère malin dont tu ne pourras guérir, il te frappera depuis la plante du pied jusqu’au sommet de la tête.»

43 «L’étranger qui sera au milieu de toi s’élèvera toujours plus au-dessus de toi, et toi, tu descendras toujours plus bas ;

44 il te prêtera, et tu ne lui prêteras pas ; il sera la tête, et tu seras la queue.»

61 «Et même, l’Éternel fera venir sur toi, jusqu’à ce que tu sois détruit, toutes sortes de maladies et de plaies qui ne sont point mentionnées dans le livre de cette loi.»

La malédiction 44, dites-vous? Gagné !

Mais revenons à nos lessives, pardon : à nos superstitions ! Nous en étions à lancer un nouveau produit anti-trouille-du-cimetière, spécial «étrangers”, sans pour autant nuire aux …intérêts de la maison-mère.

Parmi les innombrables communautés juives de l’époque, les Esséniens pointaient du doigt la survenue de plus en plus fréquente de pas mal d’entorses à la loi divine, aptes à justifier le méga tirage d’oreilles mentionné plus haut.

Célibataires, quasi-végétariens, les Esséniens pratiquaient, quant à eux, un mode de vie très austère qui leur semblait correspondre à l’esprit de la Torah des origines. Les spécialistes de la question rapportent également qu’ils pratiquaient la bénédiction du pain et du vin (Règle de la communauté, 6.5) et qu’ils se baptisaient. Pourtant, les forts en Bible et autres théologiens distingués hésitent à affirmer que les Esséniens constituent le chaînon manquant entre l’Ancien et le Nouveau Testament.  Peu importe. Un fait semble certain : Esséniens ou pas, les premiers Chrétiens étaient des Juifs, à commencer par Jésus, dont le St Prépuce, si on le retrouve un jour, devrait faire un tabac sur le marché des  reliques.

A l’instar des Esséniens, les premiers Chrétiens regrettaient amèrement que leur religion soit tombée aux mains de mauvais croyants qui, entre autres errances, n’en retenaient que les divines recettes pour augmenter chaque jour un peu plus l’étendue de leurs richesses. Le nouveau label abrahamique se devait donc de commencer par imposer une règle (d’or?) à ses adeptes. Celle de ne point se livrer aux tripatouillages financiers qui, mieux que les divisions sanglantes entre les différentes communautés hébraïques, étaient bien parties pour livrer Jérusalem aux Romains et, selon la parole de l’ Éternel, faire descendre Israël «toujours plus bas», jusqu’à le disperser aux quatre coins de la planète.

Dès lors, le Christianisme retournerait aux « fondamentaux », comme on dit en football. Il n’aurait cure des biens de ce monde ! Le Christianisme serait incorruptible ! On notera que, contre les 354 entrées au mot «argent» répertoriées dans le Pentateuque, les quatre Evangiles réunis n’en totalisent que 16 dont aucune pour l’Évangile de Jean.

Evangiles

Matthieu 19.21 : «Jésus lui dit : Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel. Puis viens, et suis-moi.»

Luc 6.20 : « Alors Jésus, levant les yeux sur ses disciples, dit : Heureux vous qui êtes pauvres, car le royaume de Dieu est à vous !

Mais j’en vois déjà au fond de la classe qui ricanent. Ils disent que tout ça c’était une combine pour consoler les pauvres d’être pauvres pendant que les riches continueraient leur petit business bien peinards. Que si les Chrétiens étaient aussi certains que ça que l’argent c’est rien qu’un boulet qui nous empêche de grimper au Paradis, alors pourquoi ils collaient leur manuel de l’utilisateur ou “Nouveau Testament” au cul de l'”Ancien” celui qui contenait des propos tels que :

Proverbes

22.7 «Le riche domine sur les pauvres, Et celui qui emprunte est l’esclave de celui qui prête.»

Zacharie

14.14 « Juda combattra aussi dans Jérusalem, Et l’on amassera les richesses de toutes les nations d’alentour, L’or, l’argent, et des vêtements en très grand nombre.»

Ou pire :

Aggée

2.8 «L’argent est à moi, et l’or est à moi, dit l’Éternel des armées

C’est sûr qu’il y a quelque chose de pas clair dans ce passage de témoin entre Juifs et Chrétiens. Un peu comme si on nous vendait une compile de recettes végétariennes avec, en préface, une tonne de conseils pour réussir un bon foie gras.

D’un autre côté, les premiers Chrétiens étant juifs, ils ne pouvaient quand même pas se mettre mal avec la famille ni faire chambre à part sur un coup de tête…

Jésus lui-même, de la lignée du roi David – excusez du peu-  se devait de faire un effort pour calmer le jeu, d’où la «parabole des talents» (Matthieu chap.25). Je vous la fais courte : il s’agit d’ «un homme partant pour un voyage» et qui confie son bas de laine durement amassé à trois de ses serviteurs. A l’époque l’euro n’existant pas encore, on s’arnaquait en «talents». Quand le voyageur s’en revint chez lui et demanda à voir le livre de comptes, le serviteur qui avait reçu 5 talents les avait joués en bourse et put en rendre 10 à son maître. Celui qui en avait reçu 2 les avait également fait fructifier et son maître en récupéra 4. Le maître était super content de ses deux larbins – excellents golden boys au demeurant – et les récompensa largement. Contrairement au 3ème à qui le maître, qui devait se douter de quelque chose, n’avait laissé qu’un seul talent et qui, pas trop sûr de lui, s’était contenté de l’enterrer dans le jardin (sic) pour ne pas le perdre et qui, conséquemment ne lui avait pas fait faire de petits, comme tout monothéiste libéral qui se respecte aurait dû. D’où le mécontentement affiché du boss:

26. «Son maître lui répondit : Serviteur méchant et paresseux, tu savais que je moissonne où je n’ai pas semé, et que j’amasse où je n’ai pas vanné  ;

27. Il te fallait donc remettre mon argent aux banquiers, et, à mon retour, j’aurais retiré ce qui est à moi avec un intérêt.

28. Ôtez-lui donc le talent, et donnez-le à celui qui a les dix talents.

29. Car on donnera à celui qui a, et il sera dans l’abondance, mais à celui qui n’a pas on ôtera même ce qu’il a .

30. Et le serviteur inutile, jetez-le dans les ténèbres du dehors, où il y aura des pleurs et des grincements de dents.»

Sacré Jésus ! C’était bien le Fils de son Père, question mauvais caractère ! Mais, bon, ce n’est rien là qu’une parabole parmi tant d’autres.

Le fait qu’un établissement bancaire portugais récemment renfloué par le gouvernement de ce bastion du catholicisme pur et dur ait choisi de s’appeler “Banco Espirito Santo“, ne prouve rien non plus.

 

(1) de Sem, fils de Noé, ancêtre des Juifs et des Musulmans

(à suivre : Moïse lave plus blanc (3ème partie))

 

Les aventures de Moïse / 4. Moïse lave plus blanc (première partie)

 

Royaume de Juda (1), année – 640

Après une étude de marché à la hauteur de son projet plus qu’ambitieux,  la SARL Abraham & Fils décide de frapper un grand coup et de promouvoir une superstition dont les statuts et le livre des charges pourront être consultés dans un manuel de l’utilisateur bilingue prévu à cet effet : en hébreu la Torah, en grec le Pentateuque.

Il s’agit d’un copié-collé de vagues réminiscences de débris de contes et légendes narrant les turpitudes de différents peuples ramant ou ayant ramé dans les parages au cours des millénaires passés (2). Entre autres emprunts et à titre d’exemple,  le constat de chercheurs éminents selon lesquels «l’histoire de la naissance de Moïse a été directement recopiée de la légende du roi mésopotamien Sargon 1er»(3).

C’est autour de cette compilation de nouvelles de science-fiction avant l’heure que ses «auteurs» se proposent d’unifier des clans juifs trop souvent enclins à s’entre-déchirer bêtement, face aux menaces en provenance des empires voisins (déjà !). Mais – et en cela réside la grande différence avec les mythes fondateurs de civilisations préhistoriques antérieures – nos plagiats vont discrètement parsemer leur catalogue d’injonctions qui, aussi divinement inspirées soient-elles, jettent ipso facto les bases dun système économique ne manquant pas, quant à lui, d’originalité. Pour la première fois dans l’histoire déjà longue du mysticisme de masse, on cause pognon. Pour la première fois le salut des âmes se retrouve inextricablement lié à celui des comptes en banque.

Torah (ou Pentateuque ou Ancien Testament)/ Deutéronome :

14 : 22 « Tu lèveras la dîme de tout ce que produira ta semence, de ce que rapportera ton champ chaque année. »

14 : 24 « Peut-être lorsque l’Éternel, ton Dieu, t’aura béni, le chemin sera-t-il trop long pour que tu puisses transporter ta dîme, à cause de ton éloignement du lieu qu’aura choisi l’Éternel, ton Dieu, pour y faire résider son nom. »

14 : 25 « Alors, tu échangeras ta dîme contre de l’argent, tu serreras cet argent dans ta main, et tu iras au lieu que l’Éternel, ton Dieu, aura choisi. »

14 : 26 « Là, tu achèteras avec l’argent tout ce que tu désireras, des bœufs, des brebis, du vin et des liqueurs fortes, tout ce qui te fera plaisir, tu mangeras devant l’Éternel, ton Dieu, et tu te réjouiras, toi et ta famille. »

Hé oui, amis Juchrémans ! Ces lignes ô combien sacrées marquent l’avènement d’une ère préhistorique étrangement ignorée des usuels scolaires.  Après l’Âge de la Pierre et celui du Bronze, voici venu, grâce à Moïse et à la divine ingéniosité de son “Éternel”, l’Âge de l’Argent!

L’argent en tant que monnaie d’échange mais, surtout, nous l’avons  vu au premier chapitre, en tant que produit monnayable ( = “intérêt”)

Près de trois millénaires plus tard, Abraham & Fils a réussi à imposer, sinon sa superstition en tant que telle ( quoique 60% de la population planétaire ne soit pas quantité négligeable ), au moins ses produits dérivés avec en tête de liste l’économie dite “libérale”(anciennement “capitalisme“).

Toutefois, comme on dit dans les pages roses du Petit Larousse Illustré, «Rome ne s’est pas faite en un jour.»

Ce qui nous amène à causer lessive, dans le bref  intermède à visée pédagogique qui suit et dont, je l’espère, l’Académie ne me tiendra pas rigueur.

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Etats-Unis d’Amérique / siège de la multinationale Procter & Gamble, année + 1964

– Dis donc, Gamble…

– Oui, Procter ?

– T’as remarqué que nos ventes Bonux avaient pas mal plongé ces derniers mois ?

– Hélas ! Qu’est-ce qu’on pourrait faire pour arranger les choses ? J’ai bien une idée mais…

– Dis toujours…

– Si on lançait un nouveau label ?

– T’es malade ! Avec toute la thune qu’on a investie sur Bonux !!! Bureaux de recherche, matériel de production, circuits de pub, graissages de pattes pour capter les têtes de gondole…

– Attends, j’ai pas fini : qu’est-ce qui nous empêche de continuer à vendre notre Bonux ET EN MÊME TEMPS  promouvoir une autre lessive ? On l’appellerait je sais pas … Dash, ça sonne bien ! Quasiment pas de frais d’investissement, à part sur le packaging, vu qu’on reprend les ingrédients de base de Bonux à une molécule ou deux près, histoire de, les mêmes usines de fabrication…

– C’est pas con, ça, mon Procter !… De plus en plus de gens achètent des machines à laver, donc si les ventes Bonux piquent du nez c’est pas faute d’une demande croissante en lessive mais clairement parce que le consommateur veut toujours du nouveau parce que, dans sa tête, le nouveau c’est forcément mieux ! Donc…

– …Donc on lui sort un produit soi-disant concurrent, il est content et nous aussi because on rafle les parts de marché que ces bâtards d’Unilever croyaient se mettre dans les fouilles !

Fin de l’intermède. Retour à la vraie vie.

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…La vraie vie où ça rigole pas tous les jours chez Abraham & Fils

Jérusalem, an 00

La demande de l’homo sapiens-sapiens en lessive, pardon : en explications / consolations lorsque confronté au douloureux mystère de sa mort certaine ou celle de ses proches, n’a évidemment pas diminué.

Le produit lancé 600 ans plus tôt sur le marché du questionnement existentiel par la multinationale  fait toujours recette. Il a même relégué les brevets égyptiens et grecs au rang d’antiquités, si on peut dire… Quant aux Romains en jupettes qui ne se sont pas grattés pour plagier honteusement les Hellènes – même faute, même punition que les fils d’Homère – ils ne perdent rien pour attendre.

Toutefois, au vu des querelles intestines entre Juifs qui, loin de s’effacer comme l’avaient espéré les inventeurs du Pentateuque, n’ont fait qu’empirer de génération en génération, le slogan pourtant génial «un seul dieu, un seul peuple, un seul chef» doit, par la force des choses, être ramené à «un seul dieu, un seul peuple». Et encore !  La notion de «un seul peuple» aurait besoin d’être réexaminée dare-dare par le bureau d’études.

Parce que, si l’on s’en tient aux Commandements de Yahweh  :

Deutéronome, chap 7

3 «Tu ne contracteras point de mariage avec ces peuples, tu ne donneras point tes filles à leurs fils, et tu ne prendras point leurs filles pour tes fils ;

…démographiquement parlant, le peuple élu par Yahweh risque de se voir rapidement débordé par ces cohortes de peuples non-élus qui, en toute bestialité, ne se grattent pas pour s’adonner fébrilement aux joies coupables de la reproduction vivipare.

Il est donc plus que temps de lancer sur le marché de la Grande Trouille Ontologique un nouveau label mystique moins explicitement xénophobe, disons même large ouvert aux croyants potentiels génétiquement non-élus qui – exponentialité oblige – représentent pour les descendants officiels de Moïse une source de revenus du plus grand intérêt (sans mauvais jeu de mots) !

Parce que, bien entendu, Dash ne remplaçant pas Bonux, ni le Nouveau Testament l’Ancien mais venant simplement se superposer à lui dans le concept biblique général, on ne remet pas en question les clauses spéciales du genre :

Deutéronome, chap. 15

1 « Tous les sept ans, tu feras relâche.

2 Et voici comment s’observera le relâche. Quand on aura publié le relâche en l’honneur de l’Éternel, tout créancier qui aura fait un prêt à son prochain se relâchera de son droit, il ne pressera pas son prochain et son frère pour le paiement de sa dette.

3 Tu pourras presser l’étranger ; mais tu te relâcheras de ton droit pour ce qui t’appartiendra chez ton frère. »

En même temps, «étranger», «frère», des mots tout ça ! Entre monothéistes libéraux de bonne volonté, il y aura toujours moyen de s’arranger…

 

(1) Royaume Israélite du Sud

(2) « La Bible dévoilée / Les nouvelles révélations de l’archéologie »
Israël Finkelstein et Neil Asher Siberman
Bayard Éditions, 2002

(3) Pour preuve, le « bitume » quasi introuvable en Egypte censé avoir été utilisé pour calfater le berceau du prophète hébreu, comme il l’avait été pour celui de Sargon.

 

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