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« MARS 2221, roman » (chap 52 : « Généalogie »)

Aujourd’hui je sais que j’ai bien fait de relire « MARS 2221, roman » avec vous. Il restait quelques bricoles à bricoler impérativement. Ce chapitre en témoigne. Amusez-vous à le comparer à l’original ! Pendant ce temps-là, vous vous tordrez pas les chevilles à faire les kakous sur des flaques de neige artificielle.

  1. Généalogie

J’avais écouté.

– À notre arrivée à l’Aquadrome, quand Mustalpha nous a présentés à Ko’jin – à l’amiral si tu préfères – l’actualisation environnementale personnalisée a fait son boulot. Ko’jin étant originaire de Hränn, à ses yeux nous étions hrännéens. À un détail près. Toi, tu lui apparaissais sous les traits d’un Hrännéen lambda…

Anthéa avait laissé flotter deux secondes avant de poursuivre, soupesant chaque syllabe.

–  …Ma pomme c’était une autre paire de hanches.

–  De manches.

– « Sans m’interrompre » on a dit. D’un point de vue strictement scientifique le clonage est l’ « obtention d’un être vivant génétiquement identique à celui qui lui a transmis son génome », ok ? Je n’ai jamais cru devoir t’en parler mais mon « original » est une gamine des bas-fonds de Rio. Morte d’une overdose le jour de ses neuf ans. Mariana Conçalves, elle s’appelait.

C’était moi ou la voix d’Anthéa s’était faite plus aigüe ? Comme brouillée par des fréquences inhabituelles. Vite contrôlées.

– Inconsolable, son sugar daddy, un gros bonnet de la « Falange Preta » – la mafia locale – avait commencé par la faire cryogéniser. Et puis un jour, ayant eu vent des exploits du chirurgien Poutine, il le contacte et lui promet une ou deux valises de grosses coupures contre le clone de Mariana. Dommage pour lui – guerre des gangs oblige – le mec ne survit pas jusqu’à la livraison. Poutine, déjà bien avancé dans le protocole de transfert, décide malgré tout de mener l’opération à son terme. Il est persuadé que tôt ou tard l’occasion lui sera donnée de rentrer dans ses frais. Tu connais la suite.

– C’est Poutine qui t’a raconté tout ça ?

– Disons que j’ai un peu hackouillé les disques durs de la maternité.

– Bon mais quel rapport avec l’amiral ?

– J’y arrive. D’après Ko’Jin je ressemble comme deux gouttes de Label 5 à un certain Yal Z’öhig, l’équivalent hrännéen de, je sais pas moi, Napoléon, Kennedy ou Mao Zedong sur Terra. Disons que sa tronche tapisse les manuels d’histoire hrännéens.

– Et alors ? L’AEP surfe sur les références mémorielles du client. Pour l’amiral tu es Yal machin chose de la même façon que l’AEP m’a servi Mustalpha en bâtard du capitaine Troy et de l’Homme du Picardie. Au fait je t’ai pas demandé comment tu le voyais, toi, le gérant de l’Aquadrome…

– Une autre fois. Laisse-moi d’abord en finir avec ma généalogie. Et accroche-toi, on remonte le temps ! On est sur Terra avant 1955. Ça a son importance parce qu’à ce moment-là les pèlerins d’outre espace ne sont pas encore tenus de se déguiser en nains verts. Le jeune Yal Z’öhig appartient à une famille hrännéenne de la haute, soucieuse d’honorer la mémoire des Aïeux…

– Ah je comprends mieux ton côté « cul béni » ! …À plus d’un titre !

– Merci, le tien fait pas honte à Yaboudhinchrillah non plus. À sa majorité, disais-je, et selon la coutume, Yal se doit d’effectuer sa grande tournée intergalactique des mégalithes sacrés. Malgré la mauvaise réputation des autochtones, il est vivement encouragé à inclure Terra dans son pélerinage. D’après Ko’jin, Terra regorge de sites sans équivalents dans les Mille Galaxies. Entre autres, l’île de Pâques et ses Moaïs. L’île de Pâques où la charmante Enoha coule des jours tranquilles parmi les siens…

Brève pause digestive à mon intention et c’est reparti.

– Apprends, mon cher lapin, que, pour une raison quelconque, à la différence des « touristes » aperçus par Endymion, les Hrännéens jouissent d’exceptionnelles conditions d’accès au Void. Yal voyage seul, avec juste un ou deux serviteurs pour le standing. Ce qui facilite la brève idylle qui, à l’ombre des statues géantes, se noue entre Enoha et lui. Brève mais, selon ses biographes, fructueuse.

Sourire complice à la mémoire des amoureux.

– Quand, à son corps défendant, Yal Z’öhig ne peut plus différer son retour sur Hränn où l’attend un destin grandiose, la belle Enoha est…

– La belle Enoha est enceinte !!! Le boug est l’arrière-arrière-arrière-arrière-grand-père de Mariana Conçalves !

– Et son arrière-arrière-arrière-arrière-grand-mère. Les Hrännéens sont hermaphrodites.

 

…demain chap 52 : « Putain de norme »…

« MARS 2221, roman » (chap 51 : « Mais alors plus du tout », suite et fin)

Voilà-t-y pas qu’en plus d’être le chef-d’œuvre que l’on sait, « MARS 2221, roman » sème un doute prémonitoire sur la sexualité débridée du chef pagnon d’Emmaüs !

résumé : lapin sent le coup venir…

– Fais pas cette tête … Je te promets, t’es le plus chic lapin que je connaisse et c’est pas près de changer… Si je t’avais pas rencontré, à l’heure qu’il est je serais en train d’assouvir les fantasmes merdiques d’un cow-boy obèse…

Elle avait tenté l’humour.

– …Sans toi je saurais même pas ce qu’est une kitare…

– Vas-y steup, arrête de tourner autour du pot. T’as rencontré quelqu’un ?

La question réflexe, inepte, dérisoire… Anthéa avait secoué ses bouclettes, respiré un grand coup et bafouillé quelque chose comme :

– Oui et non… De toutes façons… Écoute, lapin. Ici, sur le ludomaine, toi et moi bénéficions d’un traitement de faveur. Mais dis-toi bien que sur Hränn comme partout ailleurs dans les Mille Galaxies, clonés ou pas, les Terreux de souche sont persona non grata.

– Parce que toi t’es pas une « Terreuse de souche » peut-être ? Sur où tu dis ?

– Hränn. La planète de Ko’jin.

Trop d’info tue l’info. Je m’étais assis sur le pieu. Gratté la tête des deux mains. Furieusement.

– La planète de quoi ?

– De qui. Ko’jin, c’est le vrai nom de l’amiral.

– ‘Théa ! Tu me brasses comme quoi je t’ai sauvée des paumes moites d’un milliardaire yankee sur le retour et la seconde d’après tu m’annonces que tu me quittes… pour ce vieux dégueulasse ???

– Pourquoi « dégueulasse » ?

– T’as rien remarqué peut-être ? Moi si. Chaque fois qu’il te voit il te déshabille des yeux que c’en est gênant pour tout le monde !

Ah oui vous savez pas mais quelques jours après nos exploits au Shaker on était retourné à l’Aquadrome se refaire un baby ou deux comme convenu avec Mustalpha. L’amiral nous avait encore mis la misère avec ses bandes-avant. Au point qu’Anthéa lui avait demandé s’il voulait bien lui donner des cours. Mon statut de pygmalion babystique en avait pris un coup mais c’était surtout l’idée qu’elle allait passer du temps seule avec ce keum qui me filait de l’urticaire.

Éclat de rire franc et massif d’Anthéa.

– Tu n’y es pas du tout, lapin… D’accord j’ai un petit côté gérontophile, la preuve j’ai cédé à ton charme multiséculaire, mais avec Ko’jin c’est complètement autre chose. Si tu veux bien te calmer et m’écouter sans m’interrompre, tu vas comprendre pourquoi il me regarde avec autant d’insistance.

 

…demain chap 52 : « Généalogie »…

« MARS 2221, roman », chap 51 : « Mais alors plus du tout »

Enfin un ministre des Outre-mer qui cherche à établir un dialogue à la fois ferme et bienveillant avec les populations autochtones !

Bonnes fêtes de fin d’année aux unes comme à l’autre et tout de suite …retour vers

« MARS 2221, roman » !

  1. Mais alors plus du tout

La nouvelle des deux petits veinards qui avaient fait sauter la banque du Red Joystick Shaker s’était répandue comme une traînée de poudre sur Skomäth-Hellian. D’autant qu’avec Anthéa on s’employait à fêter ça dignement. Restos, boîtes de nuit, on faisait valser les galactons ! Couchés à pas d’heure, levés en conséquence. Surtout moi. Contrairement à Anthéa qui connaît et respecte ses limites en matière de défonce, ma politique générale est d’ignorer les miennes. Je voyais plus le jour. Quand l’effet des substances absorbées la veille s’atténuait au point de me laisser entrouvrir les paupières je titubais jusqu’à l’alcôve ciel de pluie où je m’employais à reprendre conscience. Ensuite direction le canapé du salon panoramique pour finir de me récupérer à la caféine devant Phobos et Déimos déjà en ascension sur le lac. Alors j’entendais les portes du Peregrin SF4 s’ouvrir. Anthéa était de retour, les bras chargés d’une nouvelle moisson de fringues. Que j’insistais pour qu’elle essaie devant moi. Pas dupe, elle savait qu’au détour d’une séquence de nudité intermédiaire, le défilé de mode passerait par la suite « Red Joy Recline » tout en marbre de Céphée.

Un soir, alors que nous gisions essoufflés sur notre terrain de foot de plumard, que mon index malhabile échouait une fois de plus à tracer un cercle parfait autour de son tétin gauche, Anthéa avait murmuré :

– Je vais partir, lapin.

– Ouaouh, aurais-je par inadvertance mis au jour une zone érogène non signalée sur les cartes d’état-major ?

– T’es con… Nan, partir… Me casser… Sur une autre planète…

Je m’étais redressé sur un coude.

– No problemo ! Moi aussi, la routine commence à me peser. Avec ce qu’on a ramassé au Shaker, je propose une tournée des grands ducs de toutes les constellations qui te branchent !

– Sauf que tu vois …

Une vie amoureuse riche en râteaux, largages et ruptures à torts partagés plus ou moins équitablement m’a affuté le sixième sens. Ce trou d’air sous la carlingue à l’annonce pressentie du départ de l’autre (ou de son non-retour) je le connais comme la poche de mon Calvin Klein. J’attends pas après météo France pour me dire quand le temps va se gâter. Nan je voyais pas. Je savais juste que j’allais pas kiffer.

 

… la suite demain…

« MARS 2221, roman » (chap 50 : «Rien ne va plus»)

  1. Rien ne va plus

Excédé par mon comportement de voyou – on l’a jamais appelé Jean-Pierre ! – le croupier tire rageusement sur son manchon. Le plafond se remet à tournoyer comme jamais. Et vas-y que je te secoue nébuleuses, quasars, pulsars, falzars, satellites naturels, quasi satellites, météoroïdes, planétoïdes, hémorroïdes, ceintures d’astéroïdes, bretelles de géantes gazeuses pire qu’un vibreur de tronc dans une oliveraie andalouse. À une vitesse de rotation qui relègue le Do-Dodonpa du Fuji-Q Highland Park – dit le « briseur d’os » – au statut de tourniquet de bac à sable !

– Rien ne va plus !

Je rétorquerais bien que c’est loin d’être un scoop mais je suis trop occupé à serrer le cul, en proie au démon de l’incertitude. Et si j’avais eu tort de me fier à mon rêve ? Si ce que j’ai pris pour le cri du blé n’était qu’un acouphène à retardement dont le Peregrin SF4 et ses champs gravitationnels asymétriques portaient la responsabilité ? J’ausculte nerveusement l’excroissance qui prospère sous mon front. Le jour du pokson chez Wilma mon blair était resté égal à lui-même. C’est que plus tard,  période « Sage entre les sages » qu’aux dires de Legrand le phénomène avait commencé à se produire, légitimant l’hypothèse « Ganesh » de Marcel-la-Menace.

Alors que je gamberge dubitatif, le manège enchanté entame une brusque décélération, précipitant les corps célestes les uns contre les autres comme autant d’usagers d’un train bondé dont un plaisantin vient de tirer le signal d’alarme. Collisions élastiques, inélastiques (les plus douloureuses) générant autant d’ondes de choc spectaculaires. Puis, le plafond ayant cessé de tournoyer, s’installe un équilibre précaire entre les forces de gravité et l’énergie thermonucléaire induite. D’ultimes réactions de fusion unissent alors Prodigieux et Merveilles dans d’indicibles cosmicoïts qui se poursuivent à l’intérieur du trou noir d’arrivée. Qui, dans un burp bigbanguesque, sous les « oh ! » et les « ah ! » d’un public conquis,  régurgite enfin la combinaison gagnante.

Mort de trac, j’ose pas regarder. Une éternité s’écoule avant que…

– Lapin !!! LAPIN !!! ON A GAGNÉ!!! LES 6 DANS L’ORDRE!!! T’es un boss !!!

Anthéa m’enlace, me roule des patins, m’invite à danser, me saute sur le dos en poussant des cris de cow-boy. C’est là qu’on entend un glapissement. Suivi d’un bruit de chute. À l’idée de ce qu’il va devoir lâcher pour un sexté dans l’ordre Eliot Ness nous a fait une syncope ! Il gît inanimé au pied de sa bulle antigrav. Le croupier est le premier à se précipiter à son chevet, qui lui tarte copieusement la gueule en guise de premiers secours.

– Volöd ! Volöd ! Par le Grand Pierrot reprenez vos esprits ! Vous n’y êtes pour rien ! La Direction fera jouer l’assurance !

Redoublées, retriplées, les baffes finissent par sortir Eliot de son coma.

– Aïe ! Ouille ! Arrêtez, ça fait mal ! Gé… Gérald ? C’est vous, Gérald ? Qu’est-ce qui vous prend ? Et qu’est-ce que je fais par terre ? Ah je me souviens ! Un S… SEXTÉ !!! UN SEXTÉ DANS L’ORDRE !!! Une possibilité sur… Sur…

– Sur 72 681 840, pas une de moins ! Regardez ! J’ai refait trois fois le calcul !

Un petit bonhomme à lunettes en qui je reconnais le professeur Tournesol – l’AEP est de plus en plus vintage, je trouve – exhibe à la ronde le portable qu’il a pas lâché depuis son entrée dans la salle. Je l’avais repéré, le pote à Tintin ! Il misait jamais sans avoir d’abord pianoté un bon moment sur sa minicalculatrice.

– Si cela vous intéresse, je peux aussi vous aider à établir le montant des gains de ces jeunes gens…

… demain chap 51 : « Mais alors plus du tout »…

« MARS 2221, roman » (chap 49 : « L’enfer du jeu », suite et fin)

Y a un truc que je pige pas. À résultat égal, plutôt que s’entourer de zombies qui dès que t’as le dos tourné te bouffent une fesse comme de le dire, pourquoi Gros Babar il nomme pas ses ministres à titre posthume ?

Bon et « MARS 2221, roman » dans tout ça ?

résumé : le bouton sur le pif de Lapsonami a triplé de volume !

 

– Quoi ? J’entends rien ! Il y a un ivrogne qui braille derrière moi !

Je me retourne. Personne. Le raffut provient de l’intérieur de ma teutê. Le barrissement de mon rêve. Le cri du blé.

– Faites vos jeux !

Dans un état second, je me remémore l’ordre d’apparition des bestioles. D’abord le tricératops. « Maa ». Sauf que lequel de tricératops ? « Ça un chou-fleur ??? Et mon ŒIL !!! ». L’œil d’« Elug-iwe » !

– Anthéa ! Sans te commander, dépose ça sur « Maa / Elug-iwe ». En 1.

– Ça marche !

Hypnotisée par mon pif, elle fait glisser fébrile les trois chips violets jusqu’à la case en question.

Dans mon songe, c’est le poulpe à tête de cigogne qui se pointe ensuite. « Khoo » sauf erreur. Je le revois joignant ses tentacules dans un « namasté » irréprochable… « Tangtak »! Le lien ! Anthéa s’empare de mes trois jetons violets.

– « Khoo / Tangtak ». Sur le 2 !

– Fait !

À l’avenir je me promets d’imiter André Breton et ses potes « surréalistes » (de bien prétentieux et insupportables branleurs par ailleurs) qui consignaient méticuleusement leurs rêves. Le primate rose à oreilles de cocker, il le pilote son putain de scooter des mers, non ? « Páhor et son gouvernail » il a dit « darling » !

– Anthéa steup ! « Limeh / Pàhor », en 3 !

Maintenant réfléchis, Lapsonami ! La baleine zébrée à ailes de chauve-souris qui succède au gorille, pourquoi elle les replie ses ailes ? Mais pour se faufiler dans l’étroit passage entre les récifs ! Le couloir du Void, de toute évidence !

– Tiens ‘Théa ! « Tenken / Kitta » ! Case 4 !

Le croupier commence à s’impatienter. À court de violets, je cale une poignée de jetons verts dans la paume tendue d’Anthéa afin qu’elle les empile de toute urgence sur le 5 de la case Limeh / Tangtak. Le gorille m’a demandé d’attacher ma ceinture ! « Tangtak » et son nœud gordien !

– Une dernière mise de rien du tout et je vous laisse œuvrer, monsieur le croupier !

Pour preuve je retourne la poche que je viens de vider jusqu’à son dernier chip.

– Anthéa ! Tu me mets tout ça en 6 sur Dö / Elug-iwe ! Le cochon d’inde était « ophtalmo dans le civil » ! L’œil ! Encore lui ! ‘A y est, c’est bon ! C’est mon dernier mot Jean-Pierre!

 

…demain sous le sapin, chap 50 : « Rien ne va plus »…