Archives de catégorie : Ecce Homo

– société, politique et autres chats écrasés

« MARS 2221, roman » (chap 16 : La poutre dans ton œil (suite))

Tiens c’est lundi sous la pluie et faut remettre ça. Pendant qu’en Phronce, grâce à Taïaut-Retaïaut et ses potes vautours, les oiseaux migrateurs ont intérêt à planquer ce qui leur reste de plumes et que, 5000 kms en bas à droite, Bibi l’irresponsable, Bibi le fou furieux, Bibi le lâche, le tueur d’enfants, Bibi le bipède le plus immonde que la terre ait porté continue sa descente en piqué vers les égouts de l’histoire, lui et tous ceux qui auraient les moyens de le ceinturer mais qui, mais que… Ici sur fyr  (et sur mon blog Médiapart) on continue de relire « MARS 2221, roman ».

résumé : Tyler descend prévenir Valbueno de l’arrivée du narrateur. Qui en profite pour s’assoupir… et son hippocampe pour faire des siennes…

J’entends ses pas résonner sur le métal des marches puis plus rien. J’ai chaud dans ce putain de scaphandre. Plus la fatigue de la matinée… À peine je me suis posé que je me sens partir. Comme le mois dernier où j’ai failli assommer un spectateur. On recevait « Holiday on Ice ». À l’entracte, les poursuiteurs ont ordre de rabattre le canon de leur projo sur le côté. Baisse d’attention due à une journée de fac bien remplie – bédos en nombre avant quatre heures de festival Marx Brothers au « Champo » – j’avais négligé cette consigne impérative. Résultat, dans son irrépressible envie de bière, le monsieur en-dessous s’était relevé trop hâtivement. Bing son crâne ! Preuve qu’au spectacle comme ailleurs, y en a marre d’être pauvre. Non seulement de tout en haut des gradins on voit pas aussi bien que le classeux moyen supérieur qui a pu investir dans un fauteuil d’orchestre mais on vit dangereusement. C’est qu’au Palais des Sports de la porte de Versailles millésime 1971, les bébés qui nous sont confiés à nous autres étudiants travailleurs du soir espoir c’est pas des lampes de poche ! Montés sur trépied articulé, ces tubes en ferraille longs d’un mètre cinquante sur quarante centimètres de diamètre évoquent à s’y méprendre les pièces d’artillerie dans le viseur desquelles, dans les films de guerre avec Jaune Ouailline et Robert Atchoum, les stuka boys ont intérêt à savoir manier le manche à balai. Je m’étais confondu en excuses et comme souvent les pauvres, le papa avait pas fait de vagues. Faut dire les cabrioles sur patins à glace de Blanche-Neige en collant pastel, paluchée en tout bien tout honneur par un Babar sous Tranxene 5 et Mickey qui trouve ça drôle, ça prédispose pas aux réactions violentes.

Mais ce soir c’est pas « Holiday on Ice » qu’on applaudit des deux pieds. Ce soir et pour une petite semaine seulement notre cher public est venu voir et entendre… Johnny « Kili Kili Watch » Hallyday !!! Et voilà-t-y pas qu’en première partie Nanette Workman y va de sa chansonnette. Ex choriste de Johnny mais aussi des Rolling Stones, John Lennon, Ringo Starr et quelques autres, c’est dire comme elle est bonne, la Nanette ! Hier, à cause de sa mini mini ultra inspirante, j’en ai pris plein les oreilles. Putain ça gueulait dans le casque. « LE 8 !!! LE 8 !!! LE 8, BORDEL, CAISSE TU FOUS ??? AU NOIR J’AI DIT, MERDE !!! AU NOIR !!! ». Hé mais c’était moi, le « 8 » !!! Le poursuiteur numéro 8 dont le kiff secret sur ce spectacle, quand Nanette a fini de chanter « ♫The night they drove old Dixie down♫ », qu’elle se lève du piano, salue longuement ses fans et se dirige vers le rideau, c’est de cadrer son popotin émouvantissime en rayon minimum. Une fantaisie qui, d’habitude, m’aide à pas m’endormir et passe totalement inaperçue quand mes onze collègues balancent la sauce, en appui de la centaine de gamelles fixes qui inondent l’avant-scène… Nettement moins inaperçue si, au terme du count-down du poursuiteur leader, juste avant que la Nanette disparaisse entre les rideaux, l’obscurité générale est déclarée et que j’omets d’arrêter mes conneries ! Comme hier. D’où le rab de miches de Nanette Workman gracieusement offert aux 5000 spectateurs ! Et, dans le casque, les noms d’oiseaux à mon endroit. Heureusement pour mézigue et sans remettre en cause ses incontestables qualités de chanteuse, au cas où Nanette Workman aurait pas apprécié mon hommage sincère autant qu’accidentel à sa plastique imparable, sa renommée relativement modeste l’aurait pas autorisée à exiger mon renvoi immédiat …Comme cet enfoiré de Noureev au mois de mai avec Étienne, un autre projectionniste. On recevait l’opéra de Marseille. Ce soir-là, avec sa potesse Noella Pontois, Rudolf devait passer en coup de vent nous régaler de quelques prouesses techniques dont il a le secret. Alors qu’en coulisses l’étoile à matelas répétait un de ces « jetés » redoutables qui font se pâmer les foules, Étienne, vaquant à ses occupations professionnelles, avait osé exister à moins d’un mètre de sa personne. Et en conséquence osé se manger un coup de chausson dans les reins. Quand bien même c’était Étienne qui avait souffert de la collision fortuite, quand bien même l’incident allait pas empêcher la Belle au Bois Dormant de dormir ce soir-là (et nous donc), le Rudolf au bord de la crise de nerfs avait réclamé la tête de son agresseur. Sinon il danserait pas ce soir et na et prout ! Pour éviter l’incident diplomatico chorégraphique, la direction du Palais des Sports s’était illico vautrée à ses pieds. On avait promis au mythomane encollanté que ok d’accord et comment pensez-donc l’inexcusable goujat serait licencié sur l’heure. Ça mangeait pas de pain et ça sauvait la recette…

 

… à suivre de près, demain par exemple …

« MARS 2221, roman » (chap 15 : L’arbre à tomates)

À l’intention des nouveaux arrivants, ici sur fyr ou sur mon blog Médiapart, bienvenue chez un auteur-éditeur qui aime se relire et pas que pour s’auto congratuler. « MARS 2221, roman » papier est en vente depuis mars 2024 en mode « impression à la demande » mais les libraires « indépendants » 🙂 ont trop à faire en tant que fourgues des cartels de la page imprimée pour lire et éventuellement conseiller à leur clientèle le travail d’un auteur-éditeur (pour plus de  détails, lire ici Demandez « MARS 2221, roman »  et aussi Continuez à demander « MARS 2221 » ou sur Médiapart :  Impression à la demande, librairie indépendante, écologie et littérature + Impression à la demande, etc… (suite et fin) .

« MARS 2221 » existe également en livre numérique (ebook, kindle), ce qui me permettra un jour d’en publier, à moindre frais, une version 2.0 comportant les menues corrections / améliorations que la présente relecture me suggère au jour le jour. Je tiens toutefois à préciser que, globalement, jusqu’ici « MARS 2221 » me satisfait tel quel. Rapide, musclé, intransigeant, différent, je le recommande chaudement à des cerveaux rapides, musclés, intransigeants et (là est la clé) différents.

 

15. L’arbre à tomates

255 ans en arrière sur Terra les mornes plaines du Hurepoix se la jouaient pas encore désert de Gobi. Pour se faire un peu de maille pendant les vacances d’été, avec Serge on avait tenté de s’enrôler dans un contingent de ramasseurs de pommes de terre. Trop jeunes, on s’était fait jeter. Trois jours aux Jardins m’ont suffi pour comprendre que c’était ce qui pouvait nous arriver de mieux. J’ai les reins en capilotade.

Comme toujours Anthéa a su tirer son épingle du jeu. L’ayant vue rafistoler les doigts dans le nez un tapis roulant qui donnait des signes de faiblesse, Tyler Jérôme s’est dit que cette surdouée méritait un autre karma que remplisseuse de cageots.

– Dis ‘Théa, ils ont pas besoin d’un arpète au service maintenance ?

– Depuis quand tu fais la différence entre une vis Philips et une Pozidriv?

– Je demande qu’à apprendre.

– Il est mignon ! Cela dit…

– Cela dit ?

– Depuis le temps que tu me serines avec tes talents de planteur de beu…

Janville/Juine, printemps 1982. Le propriétaire bègue de la jolie petite maison près du lavoir a dédécidé dede la memettre en venvente. On est priprioritaire pour l’a’acheter mais on a papas la thuthune. Anyway c’est le commencement de la fin de ma longue, tendre mais chaotique histoire sentimentale avec Sa Majesté Mulot 42 (nom de code de Marie). Elle rentre à Paris. Elle kiffe la vie là-bas. Pas moi. Denis, le designer de la pochette de « Titanic », est l’heureux locataire d’une grande baraque à Cerny, un bled voisin. Il offre de nous héberger, mon piano et moi, le temps que la gloire et ses retombées financières nous sourient. Une grande baraque avec un grand jardin. Un très grand jardin. Tellement grand qu’impossible à entretenir dans son entièreté. Les hautes herbes, les ronces et les orties ont pris possession de l’ancien verger. Parallèlement on en a marre d’engraisser les dealers, donc… Mais aux premiers coups de bêche, le moral retombe. La terre est dure comme du ciment. Vingt ans qu’elle a pas connu, ne serait-ce que le gratouillis d’une binette. Kurt (le choriste-saxophoniste-pharmacologue de Chère Crainte, présent sur « Titanic ») passe souvent dans le coin. Il a pas tout à fait terminé de claquer en dope et en restos l’épargne-logement que ses honnêtes commerçants de parents constituent à leur fils unique depuis le jour sa naissance.

– On oublie l’arrosoir. Il nous faut une irrigation à la hauteur.

Ayant dit, Kurt déclare prendre en charge la note de flotte. Et financer les soixante mètres de tuyau nécessaires à son acheminement vers la plantation. N’ayant rien de spécial à faire de mes journées de starlette en stand-by, je propose de mettre ma force de travail au service de la communauté. En une semaine je fais surgir du désert un îlot de terre vierge de toute racine, absent du plus minuscule caillou. Un îlot de cinq mètres sur quatre on ne peut plus propice à la culture intensive du cannabis sativa sisativa samva. Le terme « îlot » est d’autant mieux approprié que, tout autour, j’ai creusé une tranchée de trente bons centimètres de large sur une vingtaine de profondeur. Cette tranchée recevra chaque matin, grâce aux moyens techniques de Kurt, un apport en eau claire susceptible d’entretenir jusqu’au soir et quelle que soit l’ardeur du soleil un micro climat propice à la germination heureuse d’une bonne centaine de graines du meilleur cru. Rebelote à la tombée de la nuit. Un mois et quelques m3 plus tard, une bonne centaine de jeunes pousses vigoureuses manifestent leur volonté de s’enraciner au cœur de notre jardin extraordinaire. Fin août, elles se sont transformées en une bonne centaine de pieds hauts d’un mètre cinquante à deux mètres. Une « française » pleine de promesses dont nous tardons pas à déguster les feuilles du bas, torréfiées à point dans une grande poêle. Kurt, toujours lui, se charge de l’opération. Il appelle ça une « fricassée ».

Qu’est-ce qui te fait sourire ?

– Je souris moi ? Un rictus de douleur. J’ai plus de dos. Tu disais pour mes talents de planteur?

Anthéa se penche par-dessus son assiette.

– Entre toi et moi, il s’en passe de belles dans l’arbre à tomates.

demain la suite …

sinistre israélien + « MARS 2221 » (chap 14 : Les Jardins Suspendus)

On dit le QI des libraires indépendants mais parlons de celui des IA ! En quête d’une image pour mes « jardins suspendus », j’ai cru pouvoir miser sur les capacités d’analyse et de synthèse artistiques de CoPilot, l’IA de Microsoft dispo sur le ouaibe. Je  vous épargne le résultat.

Et tiens, en place de prétendue intelligence, je vous propose une illustration de la connerie réelle, cruelle, putride et sans excuse d’un certain premier sinistre israélien criminel de guerre et sa menace brandie à l’encontre de la population libanaise d’avoir à « subir des destructions comme à Gaza s’ils ne libéraient pas leur pays du Hezbollah ».

 

But ze show must go on ! Retour à « MARS 2221, roman » !

14.  Les Jardins Suspendus

 On ressemble à un escadron de cosmonautes des temps héroïques (« One small step for a man, one giant leap for mankind ») recyclé dans la médecine légale. Je suis le dernier à sortir du vestiaire, le zip de ma braguette était coincé.

– Un… deux… trois, quatre, ah et voici le cinquième… le compte est bon », couine Ramakanta Agarwal, quinze ans de supervision générale à la production horticole des Jardins Suspendus. « …Comme je dis, en sus de la planification des activités selon les objectifs quantitatifs et qualitatifs à atteindre, la vérification au quotidien de l’état des plants et bien sûr, en amont, la collecte des données technico-économiques propre à orienter les choix de l’entreprise en termes d’espèces et de variétés à produire afin de conforter notre pole position sur un marché planétaire des fruits et légumes en perpétuelle mutation…

Jamais il respire, le mec ?

-… sur mes frêles épaules repose le pilotage des équipes de bras cassés que Mme Cherkaoui s’obstine à m’adresser. D’après vos fiches…

Le nain obèse jette un coup d’œil de confirmation sur la tablette qui jusqu’ici lui a servi d’éventail.

– … vous vous y connaissez autant en ultraponie que ma chère et tendre en drone surfing. Néanmoins le déficit de main d’œuvre qui règne sur Mars plaidant pour une formation aussi accélérée qu’illusoire, vous avez une semaine pour assimiler les bases d’une pratique qui, comme il est dit en introduction de vos manuels… Faites passer…

« Initiation à l’horticulture martienne ». C’est le titre de la tablette que le méprisant nous enjoint de lire dans les plus brefs délais.

– … « accélère le processus de maturation des fruits et des légumes grâce à un rythme nycthéméral démultiplié ». D’où nos performances en progression exponentielle en termes de récoltes annuelles. Cela posé, le jus de synapse n’a jamais remplacé l’huile de coude, ou est-ce que je me trompe ?

Ramakanta Agarwal saute à bas de son fauteuil et trottine jusqu’à la porte. Anthéa en actionne la poignée, lui épargnant d’avoir à lever le bras pour l’atteindre.

– Merci. Si vous voulez bien me suivre. On va prendre par les coursives afin de ne pas gêner les agents des premiers niveaux.

Nouveau dédale de couloirs et d’ascenseurs montants et descendants pour gagner ce qui ressemble à une porte de cagibi. Notre guide tape le code d’ouverture sur son mobile.

– L’entrée des artistes ! Passé cette limite nous allons devoir abaisser le hublot de notre capuche. La santé des plantations en dépend. La nôtre également. Aussi invisibles soient-elles, les gouttelettes d’à peine 5 microns du brouillard nourricier qui règne de l’autre côté sont un poison pour le système respiratoire.

Nous nous exécutons scrupuleusement. La porte s’ouvre sur une vision à couper le souffle. La clarté diffuse du soleil qui entame son ascension du ciel de la planète où il pleut jamais ajoute à l’ambiance irréelle. On reste coi devant le gigantisme des lieux.

– Hé hé ! Ce bon vieil aquarium fait toujours son petit effet la première fois, pas vrai ? Entrez vite, que je referme la porte. Au prix de la gouttelette, pas question d’en laisser perdre !

À travers la capuche hermétique, la voix de coin-coin d’Agarwal me rappelle David Mc Williams dans « The days of Pearly Spencer ».

– 200 panneaux de titane d’une hauteur de 110 mètres, comprenant chacun 95 plateaux en rotation permanente. De façon, vous l’aurez compris, à ce que les cultures qu’ils contiennent bénéficient équitablement des bienfaits de l’Astre du Jour. Sachant que dès que celui-ci commence à pâlir, notre réseau de leds horticoles ad hoc entre en action. Distribués au pied des panneaux, des ascenseurs permettent d’accéder aux 22 plateformes et leurs passerelles sécurisées sur lesquelles les récolteurs sont répartis en fonction de l’avancée des pousses.

De fait là-haut dans les étages, au gré de l’entrelacs de passerelles métalliques une myriade d’opérateurs gantés, bottés et masqués tendent les bras pour se saisir délicatement des navets, carottes, poireaux et autres radis qui passent à leur portée au gré de la lente remontée des bacs.

– Je rassure ceux d’entre vous qui seraient sujets au vertige. À moins de débarquer dans un contexte de sous-effectifs particulièrement sensible, les nouveaux arrivants sont dirigés sur le rez-de-chaussée. Là où, le plus souvent et en toute logique, le travail oblige à se baisser… Hé Tyler !

Ainsi hélé, un grand costaud occupé à trier une cargaison de choux de Bruxelles s’interrompt à contrecœur et fait voile dans notre direction.

– Je vous présente Tyler Jérôme, un de nos plus brillants managers de niveau…. Tyler, l’avenir professionnel de ces losers dépend de vous ! À défaut de les initier à des mystères de l’horticulture hydroponique qui dépassent largement votre propre entendement, il serait question de leur apprendre les gestes qui sauvent en matière d’efficacité.

À travers les reflets vieux rose de son hublot en ailes de papillon (modèle réservé aux cadres), notre guide regarde sa montre pour la vingt-cinquième fois.

– Je n’ai plus qu’à vous souhaiter à tous une excellente journée aux Jardins Suspendus. Non sans vous avoir rappelé que « si les chats portaient des gants ils n’attraperaient pas de souris » et aussi que « le lion et l’agneau peuvent dormir côte à côte, mais l’un des deux aura un sommeil agité ».

– Kyste Graisseux et ses proverbes à la con ! » bougonne Tyler Jérôme, à peine le chef- jardinier a taillé la route sur ses petites jambes torses, « …Venez par-là les bleubites, que je vous tuyaute sur le boulot.

demain, chap 15 : « L’arbre à tomates »

Bon dimanche + « MARS 2221 », (chap 7 : la PMAL, suite et fin)

Bon dimanche à toutes et tous ! Bonnes tueries dans les champs inondés et au fond de ce qui reste de bois ! Bonne shoah dans les abattoirs chrétiens, halal et cacher, bon rosbif purée et … et… Bon GÉNOCIDE, « Bibi » !

Un doigt de « MARS 2221, roman » pour après la messe ?

résumé : Anthéa, le narrateur et leurs compagnons de misère arrivent à destination…

Si un nombre grandissant de migrants préfèrent Mars à Luna, c’est pas pour le plaisir de claquer leurs économies dans une traversée longue et risquée alors qu’en trois jours et pour dix fois moins cher, le premier passeur venu te dépose ni vu ni connu sur l’astre de la nuit. Oui mais voilà, sur l’astre de la nuit le marché du travail est saturé. Les autorités lunaires hésitent pas à renvoyer l’indésirable d’où il vient à leurs frais (passage à tabac inclus). Considéré le prix du billet Mars-Terra, la MICE (Mars Immigration & Customs Enforcement) peut difficilement se payer ce caprice sécuritaire. D’autant que sur Mars il y a encore du taf pour les clandos. À condition qu’ils soient pas feignants et qu’ils aient rayé de leur vocabulaire des mots vulgaires comme « retraite », « carte vitale » ou « congés payés ».

Pour faire court, sur la planète rouge, le travail au noir est, comment dire, toléré voire encouragé sans l’être. Il faut savoir que la Planetary Mutual Aid Law (PMAL), spécialité martienne,  tient les colons martiens pour responsables du devenir physique de tout SDF venu s’échouer aux abords de leur concession. Alors que dans les zones urbaines il y a toujours moyen de faire la tournée des poubelles, dès que tu t’aventures dans le maillage obscur des tunnels secondaires c’est plus le même rock’n’roll. Ok le système de pressurisation sub planétaire assure au charclo intrépide son comptant d’oxygène et, dans la journée, les puits de lumière, même distants, l’aident à retrouver son carton d’emballage protecteur – quoiqu’au quotidien les patrouilles de sécurité ramassent plus d’un cadavre gelé au bord des rails. Mais quand arrive l’heure du casse-croûte il peut rajouter un trou à sa ceinture, le charclo intrépide. Fort de ce constat, le MEC (Martian Executive Council) a eu une idée de génie : mouiller les concessionnaires ! Sacrilège, me direz-vous, en libertarien pur et dur que vous êtes. Oui et non : en compensation de leur bel effort humanitaire, aux termes de l’alinéa 23ter de la PMAL et le temps que les services de la MICE statuent sur le sort de leurs protégés légaux, les concessionnaires mouillés sont autorisés à requérir de ces derniers – je cite – « toute forme d’aide répondant aux besoins de leur activité économique ». Une « indemnisation plancher » de cette aide est depuis peu exigible, son montant laissé à l’entière appréciation du concessionnaire.

Notre suppositoire s’immobilise. Un méga placard en 3D d’un graphisme fructo légumier du plus bel effet remplit alors l’écran. « Bienvenue aux Jardins Suspendus ! Welcome ! Willkommen ! Добро пожаловать ! 欢迎 ! ». Le hayon s’ouvre sur un vaste parking peuplé  de véhicules de transports en attente de leur chargement.  On enfile nos sacs à dos et on saute à bas du camion. Dans un geste attendrissant le mari prévenant file aider son épouse à descendre de l’habitacle. Par la portière ouverte, sans couper le moteur, Lafleur nous souhaite bonne chance à tous les cinq. En plus de sa timidité naturelle envers la Surveillance des Jardins, il faut qu’il soit de retour à l’église pour les laudes de Fajr Sha’harit. On le regarde avec des sentiments mêlés faire sa manœuvre sur le parking avant de tailler la route dans un dernier solo de klaxon encourageant.

Reste plus qu’à s’asseoir au pied de la pancarte et attendre que quelqu’un s’intéresse à notre cas. Ce qui tarde pas. En provenance du poste de garde un béret basque métallique s’en vient tournoyer à trois mètres au-dessus de nos têtes.

à suivre dès demain…

 

Taïaut taïaut Retailleau ♫ + « MARS 2221 » (chap 6 : Un gros dodo, suite et fin)

Taïaut taïaut Retailleau ♫ Dernier délire du morveux, « coprince d’Andorre, Chanoine de Latran et Prince des veneurs » (sic) et sa bande de malfaisants : la chasse aux OQTF est ouverte !

Si seulement ça pouvait faire des vacances aux lapins, lièvres, perdrix, perdreaux, faisans et autres adorables petites cailles. J’en avais encore une ce matin sur le rebord de ma fenêtre. Trempée, affamée, apeurée, traquée par tous ces psychopathes en roue libre depuis 15 jours et autorisés, pendant les 5 mois à venir, à massacrer tout être sensible à poils ou a plumes osant vivre sa vie loin de l’enfer des bipèdes et leur Shoah des Animaux.

Que dire de l’Amicale des Libraires Indépendants de leur Volonté, bien décidés à euthanasier au berceau l’impression à la demande en général et «  MARS 2221, roman » en particulier?

Et tiens, puisqu’on en cause :

résumé : en route pour les Jardins Suspendus, le narrateur est, semble-t-il victime d’une nouvelle remontée hippocampique

 – Tranquillou! Les joies de la XM et sa chouette suspension hydraulique !

– Tu vas pas être malade hein son pépère ? Tu vas pas nous dégueulasser le VTT de Poupi ! Comment elle l’appelle déjà ?

On est au début des années 1990. Poupi c’est ma nouvelle compagne. Elle nous a précédés en train 400 bornes plus bas sur la carte pour aérer sa maison de famille perchée sur les hauteurs du Cantal et dans laquelle elle m’a offert de passer l’été. Quand j’ai dit à Bruno J. que j’avais besoin de convoyer deux vélos direction le trou-du-cul du monde, il en a parlé à son pote Bruno B. qui a dit « no problemo ». Bruno B. est un jeunot dingue de vitesse. Bagnole ou moto, du moment que ça speede, il est partant. 

Ma situation professionnelle a pas évolué depuis ma confidence au gars Souchon. Comme il fallait s’y attendre, l’iceberg des goûts merdeux du public a direct envoyé mon « Titanic » par le fond. Je continue à financer mon paquet de chips du soir espoir à la sueur de mes petits doigts agiles. À ce titre, l’année dernière j’ai reçu la visite d’un grand chevelu en Perfecto qui voulait s’initier aux claviers. Encore un à qui j’aurais pu suggérer de faire comme j’avais fait 15 ans plus tôt : tu te payes un « Magnus Electric Chord Organ 391 » en promo chez Tcharfour, tu voles une « Méthode Rose » au marchand de musique du coin et tu t’enfermes dans ta piaule pendant six mois. J’aurais pu mais j’avais un loyer et un pochon de beu hebdomadaire à financer alors j’ai dit « bienvenue à bord, jeune homme ! ». Le mec était cool. Notre relation prof / élève a rapidement viré pote / pote. Quand il est pas à bosser son piano, Bruno J. taquine la basse. Ça tombe bien. La passion de Gilou (le bassiste historique de Chère Crainte) pour le J&B a atteint des sommets, au point de le rendre de plus en plus violent envers son environnement matériel ou humain, pour des motifs presque toujours incompréhensibles. À la dernière répèt’ j’ai dû me réfugier dans les chiottes pour survivre. Bruno suce pas de la glace non plus mais, comme moi, il est surtout fumette. Il s’est bricolé un petit home studio tout confort dans lequel on passe des nuits à enregistrer. Et à se taper des barres non-stop.

– Rose Bonbon.

– Haha ! Rose Bonbon !!! Jar !

Bruno B. dit pas « genre » mais « jar ». Est-ce parce qu’il est originaire du sud de la France (« Genre » => « jannre » => « jar ») ? Ce serait la seule trace d’un accent qu’il a perdu depuis longtemps. Pas comme cette habitude détestable de conduire avec les genoux pendant qu’il chauffe son shit puis prépare délicatement le mélange détonnant, avant de manufacturer à 180 quelle que soit la météo. Bon mais vaseux comme je suis, pas question de m’offrir à œuvrer à sa place et on va pas réveiller Bruno J. « London Calling » à fond les baffles, les phares des bagnoles en face, l’orage, la pluie diluvienne, ça le fait roupiller, Bruno J. ! En me tassant un peu je parviens à me caler en PLS entre Rose Bonbon et Tornade (c’est le nom de mon spad à moi). Un truc pointu me rentre dans la joue. Un pignon de dérailleur, on dirait…

C’est pas un dérailleur mais une boucle de ceinturon. Je me redresse tant bien que mal.

– C’est ce qui s’appelle un gros dodo, ça madame ! Ils sont pas trop raides comme oreiller, les genoux d’Anthéa ?

à suivre demain