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« MARS 2221 » (chap 39 : « Actualisation environnementale », suite et fin)

J’adopte à l’unanimité une motion de censure touchant aux agissements du cartel de l’édition phronçaise et de sa cour de détaillants en banalités imprimées reprises si invendues, qui doivent absolument s’essuyer les yeux et cesser de confondre livres d’auteurs et livres de comptes.

résumé : l’AEP ?

– *L’Actualisation Environnementale Personnalisée. À quelques exceptions près – folklore local oblige – les membres du personnel en activité sur le biotope y sont soumis. Mustalpha correspond à vos références mnémoniques en matière de « loup de mer » soft, limite « marin d’eau douce », je me trompe ? *

Nan, elle se trompe pas la Croupière Générale ! Le keum qui manipule la radiocommande depuis le ponton en vue d’un accostage en douceur est un mix savant entre l’Homme du Picardie et sa péniche aventureuse, bourru jusqu’à foutre un peu les foies à un gamin vautré sur le tapis du salon devant la télé noire et blanche, et le capitaine Troy qui avait et de loin la préférence de ma reum.

– Impressionnant ! Sinon quelqu’un aurait aperçu mes béquilles ? Sans elles je vais jamais réussir à débarquer…

– * Lapin ! Comment pouvez-vous croire une seconde que les Instances du Vacuum se satisferaient d’actualiser un résident atteint d’une infirmité non génétique sans l’en guérir illico presto ? *

Je regarde ma jambe. Le plâtre a disparu. Ma cheville répond sans problème.

– Ouah ! Ça c’est de la médecine ambulatoire ! À propos, ça me gêne pas que vous m’appeliez « Lapin » sauf qu’en fait – « factuellement » comme les pipelettes franceculturistes aimaient à se la raconter – c’est pas mon vrai nom.

– * Qu’à cela ne tienne. Quel est votre vrai nom ? *

– Ladies first !

S’échappant du sourire Colgate d’Armand Troy, la voix rugueuse de l’Homme du Picardie couvre ma réponse. Mustalpha hisse Anthéa sur le ponton et tend la main pour renouveler l’opération avec moi. Puis il s’apprête à descendre dans le canot récupérer la Croupière qui l’en dissuade.

– *Ne vous donnez pas cette peine, cher ami, je ne fais que passer. Planning chargé aujourd’hui !*

S’adressant à nous en aparté :

– Le silence inexpliqué du gardien de la mine a dû alerter ses employeurs. Quelques taquineries aux fins limiers de la Sécurité Martienne devraient les convaincre de classer l’affaire…

Retour au capitaine Troy :

– *Ensuite cap sur Bellérophon ! On m’a signalé une suspicion de délit d’initié au casino central. Bellérophon, ce n’est pas loin de chez vous, Mustalpha ? *

Quelques années lumières tout de même, madame la Croupière Générale. Cependant il est vrai que mon épouse et moi formons le projet de fêter nos noces d’argent sur Bellérophon.

Mustalpha utilise ses cordes vocales pour communiquer. Merci l’AEP. La télépathie, ça va un moment mais ça manque de chaleur, je trouve.

– *Vos noces d’argent ! Quel âge avez-vous donc, Mustalpha ? Non ne répondez pas, cela m’obligerait à penser au mien. Donc je compte sur vous pour faire les honneurs de Skomäth-Hellian à Anthéa et Lap… son ami ! Amusez-vous bien tous les trois ! *

Sur ces bonnes paroles la tronche de flageolet disparaît sous sa carapace. Qui se met à tournoyer de plus en plus vite jusqu’à disparition complète.

Avec Anthéa on en reste comme deux ronds de flan (quatre en tout). Mustalpha rigole.

– Une nature, la Croupière Générale, pas vrai ?

Anthéa :

– Je cherchais le mot.

 

…demain chap 40 : « L’amiral »…

« MARS 2221, roman » (chap 39 : « Actualisation environnementale »)

 

 

  1. Actualisation environnementale

–  Qu’est-ce qui s’est passé ? Où on est ?

– *Dans un canot. Un canot de randonnée.*

Et cette purée de pois là, d’où elle sort ?

Ayant décollé les paupières à mon tour, je partage l’étonnement d’Anthéa. C’est à peine si je distingue ses fesses idéales posées sur le banc de nage. La Croupière Générale nous briefe depuis le pontet dans mon dos.

* Un halo de brume quantique. Résultante pseudo physique de la manifestation éphémère d’un couloir de TransVac. Dont le terminal est ce canot, instantanément conçu en fonction de notre réajustement spatiotemporel. Ne me dites pas qu’une soucoupe volante aurait mieux correspondu à vos attentes ?*

La Croupière se fait plaisir. Comment lui en tenir rigueur ?

– *…Une soucoupe flottante tant qu’on y est ! Nous soumettrons l’idée à Mustalpha. Il me semble l’apercevoir là-bas sur l’embarcadère.*  

La brume se dissipe peu à peu. On barbote sur une sorte de lagon d’un bleu-vert transparent. Escorté par un banc de poissons multicolores, le canot dérive au fil du courant. Un courant paisible qui nous pousse vers une construction élégante, montée sur pilotis. À l’entrée se tient un grand type arborant une casquette d’officier de marine. Il se fend d’un large signe de la main avant d’avancer sur le ponton à notre rencontre.

Je m’étonne discrètement auprès de la tortue.

– Je croyais que les bipèdes à poil ras étaient interdits de séjour dans le coin ? Un homoncule ?

– * Mustalpha nous vient tout droit des Marécages de Gloo, système de Markab, l’étoile la plus brillante de Pegasus. Mustalpha est un Amphibien pur jus ! Affable, aux petits soins avec la clientèle, le directoire du ludomaine se félicite chaque jour de lui avoir confié les rênes de l’Aquadrome…*

Un amphibien ? Mais…

– *Mais où sont ses nageoires, ses écailles, ses branchies ? Oh rassurez-vous, elles sont bien présentes. Et plus qu’utiles pour porter secours à l’éventuel baigneur pris de malaise ou au canoteur en perdition. Vous ne pouvez pas les voir, c’est tout ! Apprenez, Lapin…*

Je voulais vous dire… Je m’appelle pas Lap…

– * …Que le ludomaine de Skomäth-Hellian est un biotope « intelligent ». Conçu afin que le résident s’y sente « comme chez lui », quelle que soit son monde d’origine. À la nanoseconde où son cercle d’appel parvient aux Instances du Vacuum, une analyse complète de ses données physicochimiques est diligentée. Les résultats de l’analyse déterminent les algorithmes de son actualisation au sein du biotope. Durant l’entièreté de son séjour, il évoluera dans un environnement qui, sans remettre en cause son référentiel psychophysique initial, saura lui offrir ce que nous pourrions définir comme un exotisme « sur mesure ».*

 Nous c’est Bora Bora, ses lagons turquoise, ses poissons arc-en-ciel…

– *…Bora Bora et Mustalpha ! Si ce dernier vous apparaît sous l’enveloppe d’un « bipède à poil ras », comme vous dites, c’est que les composés évoluant sur le ludomaine se présentent les uns aux autres sous des angles culturels, linguistiques ou physiques en parfaite adéquation avec les leurs. L’AEP y veille en permanence.*

– L’AEP ?

 

la suite demain…

« Mars 2221, roman (chap 38 : « La clé », suite et fin)

Vous voulez que je vous dise ? Le bipède moyen m’a l’air génétiquement coincé entre entre l’infini et le pas fini. Jusqu’ici le pas fini tient la corde. Et pour un paquet d’années-lumière j’ai l’impression.

résumé : lapin doit se servir du badge et il est bien embêté…

Je m’exécute perplexe.

*Non seulement cette innocente languette de cristal est conçue pour guider son possesseur jusqu’au ludomaine auquel elle est connectée mais elle est la clé du terminal permettant d’en franchir le seuil. Pour utiliser cette clé son possesseur se contentera de lui faire décrire un cercle parfait. *

– Comme ça, à main levée ?

Nouveau secouage de tête désabusé de la Croupière.

– * La clé vous y aidera ! Quand bien même sur Terra-la-Honte le calcul d’un objet mathématique, aussi anodin partout ailleurs dans l’univers, serait tributaire d’un nombre « irrationnel ». Grand Pierrot ! 2300 ans après ce besogneux d’Archimède les savants terreux en sont toujours à définir le périmètre d’un cercle comme « la limite d’un polygone régulier lorsque le nombre de ses côtés tend vers l’infini » ! Je me demande ce qu’ils en connaissent de l’infini, ces mathématiciens d’opérette pour le mettre ainsi à toutes les sauces !*

Et pas que les mathématiciens ! Me reviennent en mémoire les implants capillaires absurdes d’un animateur Radio-Télé-Luxembourgeois des temps pré nucléaires. Yves Je-ne-sais-quoi remerciait toujours infiniment son « invité » d’avoir gavé tout le monde avec ses salades foireuses.

– *C’est quand vous voulez, Lapin ! Allons, oubliez votre « Pi » égal à 3,141592653589793238462643383279 et quelques trillions de trillions de quadrilliards de décimales ! D’un geste ample et gracieux, dans le sens des aiguilles d’une montre, tâchez d’imprimer à votre badge l’amorce d’un tracé circulaire…*

Ok mais sachez que je m’appelle pas Lap…

À peine j’ai commencé à m’exécuter que la lamelle de jarosite prend le relais comme qui dirait. Je la sens guider mon bras dans le traçage d’une circonférence impeccable, propre à faire ruisseler la petite culotte de Mme Dupouy (lire vous savez quoi). Un cercle allant s’élargissant… S’élargissant… Un cercle parfaitement parfait dont l’éclat incandescent nous oblige Anthéa et moi, à fermer les yeux.

 

…demain chap 39 : « Actualisation environnementale »…

« MARS 2221, roman » (chap 38 : « La clé »)

Je continuerais bien à prier Notre Dame de Paris Truqués pour que le gros con de chasseur d’en face qui a fait gueuler ses clebs tout le weekend se prenne une cartouche perdue dans sa cage à bière, pour que les mangeurs de saucisson que c’est tellement bon à l’apéro glissent sur une rondelle rebelle et se retrouvent pendus par les pieds et égorgés juste pour voir comment c’est tellement moins bon, pour que les agresseurs de leurs têtes blondes ou/et de leurs mères se prennent les couilles dans leur scie sauteuse que c’est chacun son tour, je continuerais bien à prier Notre Dame de Paris Truqués pour que ce monde dégueulasse soit rien qu’un cauchemar inventé par une IA psychopathe mais prier c’est rien à côté de relire « MARS 2221, roman ». Comme qui dirait un vermirefuge. Une cuillerée tous les matins et la forme revient. ‘tain, déjà le chap 38 !

  1. La clé

 – * Les « ondes gravitationnelles », comme on les appelle chez vous* », s’excuse la Croupière Générale en repassant enfin le museau hors de son abat-jour en kératine, « *…Par leur nature même elles sont susceptibles de perturber la liaison avec les Pierrots.*

Anthéa fait sa curieuse.

– Ce serait indiscret de vous demander qui sont ces « Pierrots » dont vous parlez sans arrêt?

– *De l’ordre de la colle, vous voulez dire. J’imagine que les Pierrots eux-mêmes seraient en peine de vous répondre avec exactitude. Selon le référentiel psycholinguistique terreux – encore une fois particulièrement approximatif et lacunaire – je suppose que l’appellation « Big Bangers » rendrait compte de leur nature à la fois soudaine – « out of the blue » diraient les Anglais – et… hem… ineffable. En tous cas sans les Pierrots point de salut ! Dans un environnement que vos « astrophysiciens » (ricanement télépathique) « s’accordent à décrire comme essentiellement composé de vide, les Pierrots garantissent l’intégrité spatiotemporelle des 5 % de matière solide restants. Dont les composés. Savoir vous, moi et les milliards de milliards de formes évoluant avec plus ou moins de grâce dans l’univers visible et invisible. Maintenant à mon tour de vous poser la question qui tue : « Stop ou encore ? » Comme on disait dans un jeu au moins aussi niais que le shifumi, à la fin de votre 20ème siècle.*

– Stop ou encore quoi ?

– *Je résume. Que des composés en provenance de Terra se trouvent en possession d’un authentique badge d’accréditation ludomanial ne laisse pas d’étonner en haut lieu. Toutefois – je cite – « Le Bureau Exécutif ayant pris note de l’immunité de fait dont lesdits composés font montre en réponse à ses taquineries et, conséquemment, de leur non-appartenance implicite à l’espèce terreuse, il autorise la Croupière Générale de la Spirale W1745 et ses clusters satellites à leur accorder, à titre exceptionnel et non transmissible, l’accès au ludomaine de Skomäth-Hellian. »*

Étirant son cou plissé, la tortue d’Hermann nous fixe de ses yeux inquisiteurs.

– *Encore faut-il que vous soyez intéressés. Je comprendrais parfaitement que, tout comme moi, vous ayez des milliers d’autres choses à faire…* 

Comme retourner aux Jardins bichonner la ganja d’un mafioso caractériel ? En admettant que Cherkaoui m’autorise à reprendre du service ! Pas convaincant comme projet de vie ! Le regard d’Anthéa croise le mien.

– Qu’est-ce que t’en dis, lapin ?

– J’en dis que je pousserais bien jusqu’au ludomaine de madame la Croupière Générale. Sauf que cinquante kilomètres à pied, ça use les béquilles…

– *Il n’est évidemment pas question de marcher jusque là-bas…*

Vous pensez que… 

La caparaçonnée a capté mon coup d’œil sceptique en direction de la galerie n°2.

– *Non, non, rassurez-vous ! Outre son inconfort, nous n’irions pas loin dans cette brouette. J’ai beaucoup mieux comme moyen de transport. Je vais vous demander de sortir le badge de votre poche et de le tendre à bout de bras.*

 

…la suite demain…

« MARS 2221, roman » (chap 37 : « Un, deux, trois », suite et fin)

Selon le Figaro et c’est pas (toujours) des menteurs au Figaro, « le nombre de conflits armés dans le monde n’a jamais été aussi haut depuis 1946 ». Sauf que grâce au morveux et à ses potes pleins aux as, on va enfin pouvoir retourner prier Notre Dame de Paris pour que ça s’arrange.

– Notre Dame faisez que Bibi l’escroc génocidaire il est mouru avant le dernier enfant gazaoui.

– Notre Dame faisez que Vladimir et Volodimir ils tombent amoureux l’une de l’autre.

– Notre Dame faisez que le Soudan il se ressoude, que en Somalie ils ont un lit, que au Congo ils tapent que sur leurs bongos, que en Ethiopie ils ont de quoi faire pipi, au Sahel aller à la selle et tout à lavement dans ce monde de bipèdes déboussolés.

Mais surtout Notre Dame, comme c’est bientôt la Nouêle, si Vous nous inventeriez un chti jeu de société pas trop intelligent pour passer le temps autrement qu’à se foutre sur la gueule ?

Z’avez qu’à relire « MARS 2221, roman » avec nous, ça Vous donnera des idées.

résumé : on est sur le point d’apprendre pourquoi le chap 37 s’appelle « Un, deux, trois »…

Comme vous, je m’interroge sur les deux touristes de l’espace moins pressés de se recueillir sur les « Sages de Beinan » que s’éclater au chifoumi. La Croupière Générale de la Spirale W1745 et ses clusters satellites se tape mentalement sur les cuisses.

–  * « Hito, futa, misu » ! Transportons-nous au Japon, à la fin du 11ème de vos « siècles ». L’état impérial bat de l’aile. Les conflits entre seigneurs sèment la désolation partout dans le pays. Alertés, les Pierrots se trouvent confrontés à un nouvel épisode de la folie guerrière qui n’a cessé de règner sur Terra depuis la regrettable extinction des dinosaures. Que faire cette fois pour calmer les ardeurs sanguinaires des bandes de bushidans et de tsuwamonos qui pillent et massacrent à tour de bras …sans enfreindre le principe fondamental de non-ingérence ? Des «osselets» néandertaliens au « mahjong » de la dynastie Qing en passant par le « mancala » des anciens Nabatéens, la solution la plus efficace aux débordements entre Terreux a toujours été l’introduction subreptice d’un jeu adapté aux us et coutumes des intéressés mais surtout à leurs capacités intellectuelles ! Mis au fait de celles du samouraï moyen, le Bureau d’Études Récréatives avait jeté pour lui les bases du « HI-FU-MI », forme abrégée du japonais «Un, Deux, Trois ». Un jeu parfaitement crétin qui n’a pas manqué de rencontrer son public. Déformé en « shifumi » il a pris sa place dans la liste déjà longue des activités ludiques ayant, à travers les âges, contribué à faire baisser le nombre d’homicides volontaires sur Terra-la-Honte.*

T’entends Endymion ? Tu dois bien te marrer de là-haut, mon adjudant !

– * Le plus lamentable est qu’à l’image de toute nouveauté émise par le B.E.R, le shifumi a aussitôt fait un malheur partout dans les Mille Galaxies ! De Terra il a rapidement gagné les étoiles les moins… les plus… Comment dire,… Il y a gros à parier que les plaisantins repérés à Beinan par votre archéologue amateur …*

– Feu l’adjudant-chef Endymion Calmann-Lévy. Paix à ses cendres.

– *…débarquaient tout droit des Meles-Meles, une constellation renommée pour le QI légendairement faible de ses composés.*

Notre interlocutrice mentale nous prie de l’excuser un instant. Un instant qui, comme souvent, s’éternise.

 

demain chap 38 : « La clé »…